Paris (AFP) – L’agence de presse Agence France-Presse (AFP) et la société française d’intelligence artificielle Mistral AI ont signé un accord pour que le chatbot de la start-up utilise les rapports des agences de presse pour répondre aux demandes des utilisateurs, ont annoncé jeudi les dirigeants des deux organisations.
Les parties n’ont pas révélé la valeur du contrat « pluriannuel » ni sa durée précise.
Il s’agit du premier accord de ce type conclu par l’AFP et par Mistral AI, un concurrent européen des géants américains comme le créateur de ChatGPT, OpenAI.
Les rapprochements entre les agences de presse et les développeurs d’IA restent relativement rares dans le monde, malgré une reprise de l’activité l’année dernière.
OpenAI est celui qui a conclu le plus d’accords, notamment avec le quotidien économique britannique The Temps Financierjournal français de centre-gauche Le Monde et le groupe allemand Axel Springer, qui publie un journal conservateur Le monde et style tabloïd Image.

« Il s’agit du premier accord entre deux acteurs aux ambitions mondiales, voire mondiales pour l’AFP, mais aux racines européennes bien ancrées », a déclaré le directeur général de l’agence, Fabrice Fries, aux journalistes de l’AFP.
Il a ajouté que le contrat offrirait à l’agence « une nouvelle source de revenus ».
Du côté de Mistral, « l’AFP apporte une source journalistique vérifiée que nous pensons très importante », a déclaré le fondateur Arthur Mensch.

Informations vérifiées
Des articles de l’AFP en six langues – français, anglais, espagnol, arabe, allemand et portugais – seront disponibles dès jeudi sur le chatbot Le Chat de Mistral.
Le produit fonctionne de manière similaire à ChatGPT, le premier outil de ce type à atteindre un public plus large : les utilisateurs saisissent une question et reçoivent une réponse en quelques secondes.
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Le Chat répondra aux questions sur l’actualité à l’aide d’articles de l’AFP – les textes d’information que l’agence envoie généralement à ses clients payants dans les médias, les gouvernements, les autres institutions et les entreprises.
L’intégration AFP subira une période de test pendant laquelle elle ne sera disponible que pour un segment d’utilisateurs Mistral.
Le Chat peut s’appuyer sur les archives textuelles de l’agence remontant à 1983, mais n’a pas accès à la production photo, vidéo ou infographique de l’AFP.

Les archives s’élèvent à environ 38 millions d’articles, a déclaré Fries, ajoutant que l’agence en publie 2 300 supplémentaires chaque jour.
L’accès via Le Chat de Mistral pourrait être utile aux « professionnels ou dirigeants de grandes entreprises » pour « rédiger des mémos » ou d’autres documents liés à l’actualité, a suggéré Fries.
Parmi le grand public, de nombreuses personnes utilisent les outils d’IA générative de différentes manières. Certains posent des questions sur la vie quotidienne et reçoivent des réponses que les robots ont récupérées sur Internet.
Les deux styles d’utilisation sont « complémentaires », a déclaré Mensch, le patron de Mistral.
Lorsque les questions des utilisateurs « nécessitent des informations vérifiées, l’AFP fournira » les éléments de réponse. « En ce qui concerne les achats ou la météo, cela viendra davantage du web », a ajouté Mensch.
« Revenus récurrents »
L’accord AFP-Mistral conclu jeudi intervient un peu plus d’une semaine après que la société mère de Facebook et Instagram, Meta, a annoncé qu’elle mettrait fin à son programme de vérification des faits aux États-Unis.
Dans le monde entier, l’AFP est un acteur majeur du fact-checking des contenus sur les plateformes de Meta.
« Nos discussions avec Mistral ont commencé il y a un peu moins d’un an, il n’y a donc aucun lien avec la décision de Meta », a déclaré Fries.
L’AFP avait activement choisi une « stratégie de diversification » en s’associant aux plateformes numériques alors que les médias traditionnels sont ravagés par la crise.
En 2023, l’AFP a enregistré son cinquième bénéfice annuel consécutif, rapportant 1,1 million d’euros.
Au-delà de ses revenus issus de la vente de contenus, l’AFP reçoit également de l’État français une compensation pour ses objectifs d’intérêt général, qui s’élève à 113,3 millions d’euros en 2023, sur un chiffre d’affaires de 320,1 millions d’euros.
Contrairement aux accords similaires entre médias et IA, les articles textuels de l’AFP ne seront pas utilisés pour former et développer les modèles de langage de Mistral.
Au lieu de cela, le contenu de l’agence formera « un module qui se connectera à notre système et pourra être déconnecté » à l’expiration du contrat, a déclaré Mensch.
« Il ne s’agit pas d’un paiement ponctuel, comme c’est souvent le cas dans les contrats de modèles de formation, mais d’un développement de revenus récurrents » pour l’AFP, a expliqué Fries.