Le chef présumé du clan « Yoda », l’un des plus grands gangs de drogue de Marseille, a été extradé du Maroc vers la France, suite à son arrestation l’année dernière. Cela survient alors que les législateurs se préparent à débattre d’un projet de loi visant à renforcer les mesures contre le trafic de drogue.
Accusé d’être à l’origine d’une guerre meurtrière contre le trafic de drogue dans la deuxième ville de France, Félix Bingui, 34 ans, a été arrêté le 8 mars 2024 à Casablanca.
En avril 2024, lors d’une audience à la Cour de cassation de Rabat, il accepte d’être extradé vers la France.
Il est arrivé en France mardi et devrait être entendu par le juge d’instruction, selon des informations parues dans Le Parisien journal quotidien.
Réagissant sur le réseau social X, le nouveau ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, a écrit que cette extradition était une « victoire contre le narcobanditisme ».
Darmanin, qui était ministre de l’Intérieur au moment de l’arrestation de Bingui, a remercié les autorités marocaines pour leur coopération dans le processus d’extradition, « qui permettra enfin à la justice française de le juger ».
Le mandat d’arrêt délivré par un juge d’instruction de Marseille accusait Bingui de « importation de stupéfiants en bande organisée, transport, détention, acquisition et cession de stupéfiants, association de malfaiteurs (…) blanchiment et non-justification de ressources ».
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L’avocat de Bingui, Philippe Ohayon, a déclaré qu’il « espérait que les magistrats en charge du dossier (aborderaient) le sujet avec sérénité et en toute indépendance, dans le respect des droits de la défense ».
Né à Alès, dans le Gard, Bingui a un lourd casier judiciaire, précise Le Parisien, précisant que Bingui était surnommé « le chat ».
« Il a commencé par des cambriolages, il a été arrêté une première fois pour un gros cambriolage à Montpellier et petit à petit, il a glissé vers le trafic de drogue et les règlements de comptes », a déclaré le policier Bruno Bartocetti à la télévision France 3 Provence-Alpes.
Bingui faisait régulièrement des allers-retours entre Marseille et le Maroc jusqu’au déclenchement d’une « guerre » entre le gang « Yoda » et le rival « DZ Mafia » en février 2023 qui l’obligea à rester au Maroc.
La guerre de territoire entre les deux gangs pour le contrôle de points de deal lucratifs – jusqu’à 80 000 euros de chiffre d’affaires quotidien à certains endroits – a marqué la ville et provoqué une importante répression de la part des autorités.
Selon Le Parisien35 des 49 décès liés au trafic de drogue en 2023 étaient liés à ces deux principaux gangs.
Il faut rester « vigilant »
Mardi, le préfet de police et le procureur de Marseille ont présenté leur dernier rapport sur la situation sécuritaire.
Alors que le nombre de décès liés au trafic de drogue dans la ville du sud était tombé à 24 en 2024, la police reste sur ses gardes.
La diminution du nombre de ces « narchomicides », comme les appelle la police marseillaise, est en partie due à « la victoire de la mafia DZ sur le clan Yoda », a expliqué à l’AFP le procureur général Nicolas Bessone.
« Mais nous devons rester très vigilants, il y a encore des conflits en cours », a-t-il déclaré, évoquant ce qu’il appelle le « narcoterrorisme », où des gangs utilisent des armes pour terroriser « tout le monde et en particulier la population qui y vit ».
Selon le préfet Pierre-Edouard Colliex, la baisse du nombre de décès est également à mettre au crédit de la « mobilisation historique » des services de police et de justice.
En 2024, plus de 2 000 personnes ont été mises en examen à Marseille pour des délits liés aux stupéfiants, dont 833 ont été placées en détention provisoire, et plusieurs commandos ont été interpellés avant de pouvoir agir.
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Le procureur a indiqué que « plus de la moitié de la délinquance juvénile » à Marseille est liée au trafic de drogue, citant quelque 480 arrestations d’adolescents au cours de l’année écoulée.
Attirés par le mirage de « l’argent facile » pour faire les courses des gangs, ces jeunes viennent de toute la France, a indiqué le procureur.
Pour lui, les autorités ne doivent pas lâcher prise sur les bandes, à l’instar des mesures de « nettoyage XXL » lancées par le président Emmanuel Macron depuis Marseille en mars.
Les dernières statistiques surviennent alors que les législateurs se préparent à débattre d’un projet de loi visant à développer de nouvelles mesures contre le trafic de drogue en France.