Le réalisateur français Bertrand Blier, créateur de films cultes et provocateurs comme Les Valseuses, Buffet Froidet Tenue de Soirée, est mort. Le cinéaste chevronné, célèbre pour sa narration audacieuse et non conventionnelle, est à l’origine de certains des succès d’art et d’essai les plus emblématiques de France des années 1970 et 1980. Il a également contribué au lancement de la carrière internationale de l’acteur français Gérard Depardieu.
Blier, né en 1939, est décédé paisiblement chez lui lundi soir à Paris, entouré de sa femme et de ses enfants, a indiqué son fils Léonard Blier.
Plusieurs personnalités françaises ont salué son parcours, soulignant que ses œuvres étaient solidement ancrées dans une époque révolue.
« Dans des films qui capturaient l’esprit de leur temps, il a donné des rôles emblématiques à certains des plus grands acteurs. Bertrand Blier était un cinéaste remarquable et anticonformiste, passionnément dévoué à la liberté de création », a écrit la ministre française de la Culture Rachida Dati.
« A la fois écrivain et cinéaste, cynique et provocateur, moraliste et blasé, Bertrand Blier aimait les femmes, mais il les faisait souffrir aux mains de ses personnages masculins », a ajouté Gilles Jacob, ancien président du Festival de Cannes.
La carrière de Depardieu
Il suit les traces de son père et débute au cinéma en tant qu’assistant réalisateur. En 1963, il dirige son père Bernard Blier, dans son premier long métrage, « Si j’étais un espion ».
En 1974, Blier choque la France et lance la carrière de Gérard Depardieu avec Les Valseusesune histoire subversive sur deux jeunes voyous en balade dans une frénésie sexuelle et criminelle à travers le pays.
Le titre, qui signifie testicules en argot français, a été traduit de manière assez primaire par « Going Places » pour sa sortie américaine.
Basé sur le propre roman de Blier, il est devenu un classique culte et a été le premier de ses neuf films avec Depardieu, que Blier a décrit plus tard comme « mon acteur favori, mon frère de cinéma, mon alter-ego ».
Une parabole du malaise masculin face à la libération des femmes, que beaucoup trouvaient à l’époque Les Valseuses moralement ambigu et ses scènes de sexe brutales et vulgaires, mais son thème dominera presque toute son œuvre ultérieure.
Son œuvre est actuellement critiquée pour sa misogynie et la manière dont elle dépeint la domination masculine. Ces dernières années, certaines de ses actrices, comme Miou-Miou et Brigitte Fossey, ont partagé qu’elles vivaient parfois son humour grossier comme une humiliation ou une agression.
« Machisme blessé »
Le même « machisme blessé » transparaît dans son plus grand succès international, Trop belle pour toi (« Trop beau pour toi ») en 1989, avec Depardieu dans le rôle d’un homme qui s’ennuie de sa belle épouse et tombe amoureux de sa secrétaire beaucoup plus simple.
Considéré comme un classique moderne, le New York Times l’a qualifié de « comédie romantique exceptionnellement riche ».
Il a également valu à Blier le prix du jury au festival de Cannes et cinq César, dont celui de la meilleure actrice pour la partenaire de Depardieu, Carole Bouquet, qui jouait l’épouse.
« Ce qui m’intrigue encore et encore, c’est que les amitiés masculines ne posent relativement pas de problèmes, et pourtant, lorsque les hommes s’approchent de ce qu’ils désirent passionnément, alors leurs problèmes commencent », a-t-il déclaré.

Blier fait irruption à une époque où les réalisateurs de la Nouvelle Vague française s’essoufflent, avec ses comédies noires peuplées de marginaux, de méchants, de policiers voyous et de prostituées, considérées comme uniques et inclassables.
Il a déclaré qu’il trouvait le cinéma moderne « irritant », même si beaucoup ont trouvé des échos de son travail dans celui du réalisateur surréaliste espagnol Luis Bunuel.
Succès aux Oscars
En 1979, il remporte l’Oscar du meilleur film étranger avec la comédie ménage à trois « Sortez vos mouchoirs », mettant toujours en vedette le duo Depardieu-Dewaere.
En 1980, il remporte un César pour Buffet Froid (Cold Cuts), mélange d’absurde et de réalisme, dans lequel il dirigea une dernière fois son père, forcément aux côtés de Depardieu.

Iconoclaste né, il n’a jamais été aussi heureux que lorsqu’il se moquait des mœurs sociales, et a connu un autre succès avec le provocateur Tenue de soirée (Evening Wear) en 1986, s’attaque à l’homosexualité et aux triangles sexuels.
Dans les années 1990 et 2000, après une série d’échecs commerciaux, Blier avait du mal à obtenir des financements pour ses films.
En 2010, il revient au surréalisme avec le « Clink of Ice » qui aborde le cancer, avec un écrivain alcoolique incarné par Jean Dujardin parlant de sa maladie, qui prend la forme d’un homme incarné par Albert Dupontel.