Lors de sa visite à l’École nationale d’administration pénitentiaire à Agen jeudi, le ministre de la Justice a fourni des informations détaillées sur la première prison de haute sécurité dédiée aux trafiquants de drogue, qui deviendra « effective » le 31 juillet.
« Vous représentez une administration majeure confrontée à des défis énormes : au sein des prisons et des lieux de détention sous l’autorité judiciaire, une part essentielle de la République est en jeu », a affirmé Gérald Darmanin en préambule de son discours aux étudiants de l’École nationale d’administration pénitentiaire (Enap) située à Agen (Lot-et-Garonne), où il s’est rendu le jeudi 23 janvier.
Le ministre de la Justice est revenu en détail sur l’attaque d’un fourgon dans l’Eure, survenue au printemps, ayant coûté la vie à deux agents pénitentiaires. « Ce qui s’est produit le 14 mai dernier n’est pas seulement un meurtre lâche et brutal : c’est une atteinte sérieuse à l’honneur et à l’autorité de l’État », a-t-il jugé, ajoutant que « la justice poursuit sans relâche ceux responsables de ce massacre ».
Dans son allocution, Gérald Darmanin a annoncé plusieurs mesures, concernant notamment la lutte contre la criminalité liée au trafic de stupéfiants dans les prisons. Voici les principales annonces faites lors de cette intervention.
Mise en service de la première prison de haute sécurité pour narcotrafiquants le 31 juillet
Le ministre de la Justice a annoncé que la prison de haute sécurité destinée aux narcotrafiquants, dont la création avait été annoncée début janvier, sera opérationnelle le 31 juillet. Cette prison accueillera « les cent plus gros » trafiquants de drogue du pays, quel que soit leur statut de détention, à partir de mars dans cet établissement rénové dont l’emplacement n’a pas été précisé. Il a promis un site « inviolable » où l’introduction de téléphones ou de drogues sera impossible.
Un budget de « quatre millions d’euros » a été débloqué pour cet établissement. Deux autres prisons similaires seront créées dans les deux années à venir pour accueillir les personnes désignées par le renseignement pénitentiaire comme particulièrement dangereuses dans le narcobanditisme, qui sont plus de 600 selon Gérald Darmanin. Actuellement, 17 000 personnes sont incarcérées pour des délits relatifs au trafic de stupéfiants et à la criminalité organisée, a-t-il souligné.
Création d’une « police pénitentiaire »
Qualifiant la future création d’une « police pénitentiaire » en 2026 de « révolution », le ministre a précisé que cette force fera de l’administration pénitentiaire la troisième force de sécurité intérieure de notre pays. Elle aura pour mission d’évaluer « les missions de sécurité, de contrôle, de surveillance », ajoutant qu’elle « viendra en aide aux courageux agents des SPIP » [Service pénitentiaire d’insertion et de probation] qui posent des bracelets électroniques dans des quartiers souvent évités. « Nous ne pouvons plus les laisser seuls », a insisté Gérald Darmanin.
Doublement du nombre de places en semi-liberté d’ici 2027
Constatant que la situation des prisons est « indigne d’un pays comme la France » avec « 4 000 matelas au sol » et des prisonniers mélangés non pas selon leur dangerosité, mais selon le moment de leur arrivée devant la justice, le ministre a annoncé le doublement, d’ici 2027, des places de semi-liberté.
« Cela représente 3 000 places que nous construirons dès la fin de cette année, en révisant complètement les infrastructures et les cahiers des charges des établissements pénitentiaires », a-t-il expliqué devant les étudiants de la 219e promotion de l’Enap, précisant que ce doublement s’effectuera « en écoutant davantage les élus locaux, prêts à accueillir des lieux de privation de liberté, mais pas toujours les prisons pour personnes extrêmement dangereuses ».
Proposition de créer une « direction générale de l’administration pénitentiaire »
Durant son allocution, Gérald Darmanin a également annoncé son intention de proposer au Premier ministre François Bayrou la création d’une « direction générale de l’administration pénitentiaire ». Cette nouvelle direction sera dotée de « deux branches » : l’une dédiée à la sécurité pénitentiaire et l’autre à l’insertion et à la probation, afin de renforcer le rôle des agents d’insertion et de probation dans une direction centrale.
Expulsion des étrangers définitivement condamnés
Le ministre a aussi évoqué le lancement d’une mission confiée au directeur de l’administration pénitentiaire pour organiser, en lien avec les préfectures, l’expulsion des étrangers définitivement condamnés vers leur pays d’origine.
Gérald Darmanin a rappelé que « 25% des détenus » en France sont des étrangers. « Bien sûr, une personne qui n’est pas de nationalité française et qui a commis un délit doit répondre de ses actes devant la justice (…), bénéficier d’un procès équitable et être détenue dans des conditions dignes », a-t-il déclaré. « Mais une fois condamnés de manière définitive, il n’y a pas de raison pour que des personnes non françaises restent incarcérées en France. »