Le gouvernement continue de négocier avec les partis de gauche concernant l’élaboration du budget pour 2025. Le Parti socialiste a proposé de retarder de six mois l’entrée en vigueur de la réforme repoussant l’âge de la retraite à 64 ans. La question qui se pose est de savoir si cette demande peut être mise en œuvre.
Le gouvernement parviendra-t-il à conclure un accord de non-censure sur le budget avec une partie du Nouveau Front populaire ? Tout au long de la semaine, les discussions ont eu lieu au ministère de l’Économie, en particulier avec le Parti socialiste, le Parti communiste français et les écologistes. La suspension de la controversée réforme des retraites pourrait contenter une grande partie de la gauche, débouchant ainsi sur un éventuel accord de non-censure.
L’âge de départ fixé à 64 ans est au cœur des oppositions. Une question demeure : le gouvernement a-t-il la possibilité, d’un point de vue légal, de suspendre uniquement l’article de la loi qui retarde l’âge de départ à 64 ans ? Cela est faisable, contrairement aux insinuations de François Bayrou en décembre. Le Premier ministre avait écarté le gel de la réforme des retraites afin de préserver les aides aux petites pensions que le texte prévoit : « Dans la réforme, il existe des bénéfices, notamment pour celles et ceux aux petites retraites, qui bénéficieront de 60 euros supplémentaires pour une pension de 1 000 euros. »
Un ajournement envisageable via décret
En réalité, le gouvernement a la capacité de suspendre uniquement le passage de l’âge de départ à 64 ans par un simple décret, précise le constitutionnaliste Dominique Rousseau : « Le décret d’application fixant l’âge de départ à 64 ans a été adopté, et le Premier ministre a toujours la possibilité de modifier ce décret. Il pourrait élaborer un décret d’application qui retarderait l’exécution de l’article de la loi fixant l’âge de la retraite à 64 ans de six mois. »
L’autre option est d’adopter une loi, mais cela demanderait plus de temps. « Il faut soumettre un projet de loi, obtenir l’examen par le Conseil d’État. Puis il doit être voté par l’Assemblée nationale, ensuite par le Sénat. Un aller-retour entre les deux chambres est nécessaire, et potentiellement une commission mixte paritaire pourrait intervenir. » En somme, selon Dominique Rousseau, le processus législatif pourrait s’étendre sur une période de six mois.
Pour abroger la réforme dans son ensemble, il faut une nouvelle loi
Il n’est donc pas impératif pour François Bayrou de stopper l’ensemble de la réforme des retraites, qui est de toute façon une action impossible. Le gouvernement ne peut pas émettre un décret qui suspendrait entièrement cette réforme. Une seule voie est envisageable : « Seule une loi peut défaire ce qu’une autre loi a instauré, » explique le constitutionnaliste Dominique Rousseau.
Pour interrompre la réforme des retraites dans son intégralité, et pas seulement un article particulier, François Bayrou devrait donc soumettre une loi au vote du Parlement. Aucune autre option n’est viable. D’ailleurs, après sa prise de fonction, le chef du gouvernement avait rejeté d’emblée cette requête des socialistes : « Dans quel monde vivent-ils ? », avait-il alors rétorqué avec irritation.