Au début de cette année, l’administration de François Bayrou fait face à la pression d’une possible motion de censure. Outre le destin du Premier ministre, le Rassemblement national et La France insoumise s’activent pour mettre l’accent sur l’avenir du président dans le discours politique.
En ce début d’année 2025, la situation politique reste extrêmement complexe alors qu’un nouveau gouvernement dirigé par François Bayrou est déjà sur la sellette. Avant que le Premier ministre n’ait eu l’occasion de délivrer sa déclaration de politique générale, prévue pour le 14 janvier, les membres du mouvement des Insoumis ont déjà manifesté leur intention de déposer une motion de censure. Les socialistes pourraient bien se joindre à cette initiative. Bien que Marine Le Pen ait montré une certaine retenue à sa nomination, François Bayrou reste très conscient de la fragilité des promesses de la dirigeante de l’extrême droite, d’autant plus après sa volte-face de décembre alors qu’elle a d’abord soutenu puis contribué à la chute de Michel Barnier.
Ce climat de confusion s’explique en grande partie par la présence de ce que l’écrivain Guliano Da Empoli appelle les « ingénieurs du chaos », des figures charismatiques nourrissant le populisme à travers le monde. En France, ces architectes de la discorde sont incarnés par Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, avec Emmanuel Macron dans leur ligne de mire. Il n’est même pas nécessaire pour la leader du Rassemblement National de faire elle-même appel à la démission du président, un rôle que Jean-Luc Mélenchon endosse volontiers. Marine Le Pen a intérêt à ce qu’il prenne la parole en son nom, face à une possible inéligibilité, tandis que Mélenchon est le seul à gauche à avoir les moyens financiers de soutenir sa propre candidature.
Crise politique ou révision du système ?
En cette année 2025, les deux leaders cherchent à imposer la remise en question de l’avenir du président comme sujet central des débats publics. Des enquêtes d’opinion viennent appuyer cette démarche, montrant que six Français sur dix souhaitent qu’il quitte le pouvoir. Ce niveau d’impopularité rappelle celui rencontré par Nicolas Sarkozy ou François Hollande durant leurs mandats, bien que le débat public soit aujourd’hui encore plus exacerbé, effaçant certains repères historiques.
Réorganiser des élections présidentielles anticipées ne répondrait pas aux problèmes actuels ; cela risquerait en fait de faire passer la crise politique à une crise systémique, voire démocratique. Comment imaginer qu’une campagne de 35 jours puisse stabiliser le pays ? Un tel précédent pourrait fragiliser durablement la République, plaçant tous futurs présidents sous la menace d’une démission forcée dès qu’ils perdent en popularité. Pourtant, insoumis et lepénistes ne peuvent agir seuls ; ils nécessitent le soutien de toute la gauche, notamment du Parti socialiste, pour renverser les autorités en place et accentuer l’instabilité. Ces « ingénieurs du chaos » restent dépendants de l’appui de ceux que Lénine qualifiait d’« idiots utiles », ces alliés inconscients qui se retournent contre leur propre cause.