Jeudi, Bruno Retailleau a dévoilé une campagne percutante visant à s’attaquer au problème du trafic de drogue, en mettant en avant la part de responsabilité des consommateurs de substances illicites.
Une initiative qualifiée d’« inédite » est lancée dans le but de provoquer un « choc » chez ceux qui prennent des substances illicites. Le ministre de l’Intérieur, qui considère le combat contre le trafic de stupéfiants comme une priorité nationale, a présenté une vidéo jeudi 6 février pour « culpabiliser » les usagers de drogues.
Ce spot est diffusé sur les chaînes de télévision, en ligne et dans les transports en commun à partir de dimanche. Bruno Retailleau n’hésite pas à vouloir « choquer », cependant, cette séquence de 30 secondes ne semble pas obtenir l’effet désiré parmi les jeunes usagers interrogés par 42mag.fr à Paris.
« Je n’ai pas saisi le message »
Bien que le spot vise l’efficacité : une jeune femme allume un joint en soirée, suivi d’une ligne de cocaïne qui provoque une série d’incendies. Un poteau lumineux, une automobile et même une peluche prennent feu, un coup de feu retentit, et finalement, une affirmation culpabilisante : « Ces personnes payent le prix de la drogue que vous achetez ». Raquel et Serena, étudiantes en chimie, restent dubitatives face à cette vidéo : « Je n’ai pas compris, il y a un peu des raccourcis. »
Elles consomment du cannabis de manière occasionnelle et perçoivent le message comme simpliste. « Ça incite à la réflexion, certes, mais je doute que cela dissuade les gens simplement en regardant ce clip. Ça n’incitera pas à se dire ‘Bon, j’arrête tout de suite’, exprime l’une d’elles. À mon avis, il vaut mieux sensibiliser plutôt que d’insister sur ‘Meurtre, meurtre, feu, balle’. »
« Ce n’est que pour culpabiliser, sans aucune sensibilisation. »
un étudiant parisienà 42mag.fr
Cette observation est partagée par d’autres étudiants présents à l’université : « Il ne mentionne même pas la santé, alors que c’est important. Là, ça ressemble plus à une provocation à mes yeux », s’indigne une étudiante.
« Pas assez détaillé »
Bien que Bruno Retailleau ait également déclaré jeudi que les violences liées au trafic de drogues avaient entraîné 110 décès et 341 blessés l’an dernier en France, ces données ne sont pas incluses dans la vidéo. Selon deux jeunes femmes de 19 ans, ces informations auraient pu la rendre plus percutante : « Je pense que certains films font mieux prendre conscience de ces enjeux. Nous, étudiants, fumons parfois du cannabis ou d’autres substances sans réellement mesurer les conséquences. À l’école, lorsqu’on commence à expérimenter cela, ce n’est pas bien expliqué et on ne réalise pas dans quoi on s’engage. »
Et lorsque le ministre de l’Intérieur insiste sur le fait qu’un simple joint a un goût de sang, cette étudiante en communication préfère nuancer. « Il faut nuancer. Consommer de la cocaïne c’est différent de consommer du cannabis ou du shit, explique-t-elle. Ce n’est pas du tout au même niveau en réalité. »
Et tous s’accordent à dire que le clip du ministère de l’Intérieur ne modifiera pas leur consommation de drogue de manière immédiate.