Ce mercredi, la Commission européenne est prévue de dévoiler un ensemble ambitieux de mesures législatives, baptisé « Omnibus ».
Samedi 22 février, Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, a exprimé sur France Inter son inquiétude face à la nouvelle directive européenne surnommée « Omnibus ». Elle affirme que cette initiative pourrait entraîner une régression des droits sociaux, environnementaux et fiscaux en Europe. La Commission européenne prévoit de dévoiler ce mercredi un ensemble complexe de lois, visant à simplifier et alléger certaines normes, notamment dans les domaines social et environnemental. Ces changements concernent aussi le Green Deal agricole et le « devoir de vigilance » des entreprises, qui impose aux sociétés de s’assurer que leurs sous-traitants respectent des conditions de travail acceptables.
Sophie Binet considère la situation actuelle comme préoccupante. À ses yeux, l’Europe est à un carrefour : soit elle suit le modèle américain marqué par la déréglementation prônée par des figures comme Elon Musk et Donald Trump, soit elle défend et préserve le modèle européen. Elle estime que la directive « Omnibus » baisse les standards en matière de droits en Europe.
« Autoriser les multinationales à agir sans contraintes »
Sophie Binet explique que la directive en question risque de donner carte blanche aux multinationales pour agir à leur guise, aussi bien en Europe qu’à l’international. Le « devoir de vigilance », essentiel selon elle, encadre la responsabilité sociale et environnementale des grandes entreprises à travers le monde.
Ce concept a vu le jour après la tragédie du Rana Plaza au Bangladesh en 2013, où l’effondrement d’un immeuble avait causé la mort de près de 1 100 ouvrières du textile. Parmi les marques impliquées figuraient Mango, H&M, Primark, et Camaïeu, qui avaient rejeté la responsabilité sur leurs sous-traitants locaux.
Sophie Binet insiste sur l’importance du devoir de vigilance. Il permet aux ONG et syndicats de critiquer et poursuivre des entreprises comme Total pour ses actions environnementales en Ouganda, ou Yves Rocher pour discrimination en Turquie, et il contribue à lutter contre le travail des enfants et à promouvoir des conditions de travail dignes à l’échelle mondiale.
« Un changement radical et regrettable », déplore la CNCDH
Bien que la législation sur le devoir de vigilance ait été adoptée en Europe en 2024, avec un délai d’application en France jusqu’en 2026, Sophie Binet note qu’elle commence à peine à être mise en œuvre et déjà elle pourrait être supprimée. Le 10 février, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme a ainsi écrit au président de la République et au Premier ministre, s’inquiétant du rôle de la France dans l’initiative de cette législation « omnibus » proposée par la Commission européenne.
La France a effectivement envoyé une note le 20 janvier, exprimant son soutien à cette réforme. Pour la CNCDH, il s’agit d’un changement de cap inédit et regrettable, qui trahit des années d’engagement de la France pour une conduite responsable des entreprises. Selon un communiqué du 12 février, les propositions françaises semblent témoigner d’une volonté de dérégulation qui pourrait entraîner une détérioration des standards sociaux et environnementaux, allant à l’encontre du rôle moteur que la France souhaite jouer en faveur d’une mondialisation juste et régulée.