L’industrie du doublage du film de France représente 15 000 emplois, notamment des acteurs, des traducteurs, des techniciens sonores et des réalisateurs artistiques. Et maintenant, le secteur se moque pour s’assurer que sa voix est encore entendue face à la révolution de l’intelligence artificielle.
Dans un studio près de Paris, dans une pièce sombre avec des murs recouverts de tissu bleu, un écran montre des extraits de la série animée japonaise Dragon ballon. Debout dans un microphone, l’acteur Bruno Méyère basse plusieurs personnages en français.
« Vous pouvez aller jusqu’à » brut « … là-bas, c’est parfait », applaudit le directeur artistique Brigitte LeCorder, également un acteur de voix off français bien connu, qui travaille ce jour avec son fils Louis, le directeur de production.
« Je suis surtout connu pour ma voix de dessin animé, oui-ui (noddy), et surtout Dragon ballon», Dit LeCordier, qui est la voix du jeune fils Goku dans la série de longue durée.
«Nos voix sont volées»
Malgré son succès, la montée de l’intelligence artificielle dans le secteur la s’inquiète. « Nous ne sommes pas contre l’IA. Cela peut porter des choses d’un point de vue technique et en termes d’outils », a-t-elle déclaré à 42mag.fr. « Mais nous sommes très inquiets. Nous voulons continuer à créer et être des artistes, ne pas être remplacés par quelque chose qui ne crée qu’en nous volant. Nos voix sont volées pour générer l’IA et nous faire dire des choses que nous n’avons pas choisies de dire. »
L’industrie du doublage français a été récemment choquée par un extrait du dernier film de Sylvester Stallone, Armuredans lequel la voix off française de l’acteur américain a été fabriquée à l’aide de l’IA.
Non seulement le résultat final était considéré comme une mauvaise qualité par l’industrie, mais il avait été produit en utilisant la voix d’Alain Dorval, l’acteur de voix française qui avait précédemment surnommé la voix de Stallone – mais est décédée en février 2024.
Sa fille, Aurore Bergé – actuellement ministre du gouvernement français – a déclaré que la famille a accepté que la voix de son père soit utilisée pour un test, mais ne l’a pas autorisée au-delà.
C’est un scénario qui a soulevé des questions sur l’éthique dans l’industrie, face aux nouvelles technologies.
« L’IA prend l’œuvre d’artistes. Pouvons-nous nous passer d’artistes dans la société? » Lecordier demande. « L’IA ne crée pas. Il reproduit simplement ce qui a déjà été fait, à un niveau médiocre », ajoute-t-elle.
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Préparation et post-enregistrement
Du côté du studio, loin du microphone, un professionnel de l’industrie estime que les craintes des acteurs sont légitimes, mais que bien que l’IA ne puisse pas reproduire fidèlement l’émotion, elle peut être utile pour accélérer les processus de préparation et de post-enregistrement, ou Pour modifier un mot en cas d’erreur.
Les enjeux économiques sont importants pour les clients: en France, une minute de doublage peut coûter entre 280 et 400 €.
Les négociations sont en cours entre les syndicats, les studios, les grandes entreprises américaines, les chaînes de télévision et les plateformes de streaming pour établir un cadre plus protecteur pour les professionnels du doublage français.
Les acteurs hollywoodiens et la grève des scénaristes de 2023 se profilent, bien que l’action industrielle ne soit pas encore sur la table en France.
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Données biométriques
Certains acteurs disent qu’ils ont déjà vu leur charge de travail diminuer en raison de l’IA.
Par exemple, « des maquettes ou d’autres éléments qui ne sont pas diffusés mais ont été enregistrés et pour lesquels nous avons été payés », en particulier dans le secteur de la publicité, explique Patrick Kuban de Lesvoix.fr et un membre de United Voice Artists, qui rassemble des organisations à partir de 35 pays sur la question de l’IA et des travaux d’expression.
Il y a également eu des cas de sociétés d’IA, basées en dehors de la France, clonant les voix des acteurs d’animation sans leur consentement.
« Nous demandons que notre travail ne soit pas exploité et que notre voix et notre visage sont protégés. Ce sont des données biométriques. Nous devons être invités à notre consentement. Cependant, les plateformes basées à Dubaï, aux États-Unis ou en Israël contournent les données générales européennes Règlement sur la protection (RGPD) pour offrir des services de livre audio ou de doublage en France avec des voix «volées» », explique Kuban, faisant écho aux plaintes qui ont déjà été faites par les groupes syndicaux impliqués dans les négociations en France.
Les discussions progressent, lentement, et une pétition intitulée « pour le doublage créé par les humains pour l’homme », lancé en janvier de l’année dernière, a recueilli plus de 160 000 signatures.
Les travailleurs du secteur ont toujours une position forte dans les négociations: près de 9 téléspectateurs sur 10 en France regardent des films et des émissions de télévision surnommées avec des voix françaises.
► Ce rapport a été produit par Justine Fontaine pour le reportage du podcast 42mag.fr en France.