Le moment décisif se profile pour Richard Ferrand, choisi par Emmanuel Macron pour occuper le poste de président du Conseil constitutionnel. Il doit passer son audition mercredi matin devant la commission des lois à l’Assemblée nationale, suivie d’une rencontre avec la commission équivalente au Sénat, avant qu’un vote à bulletin secret soit organisé.
Pour que la proposition de nommer Richard Ferrand à la tête du Conseil constitutionnel soit acceptée, il est essentiel qu’il ne recueille pas l’opposition de plus de 3/5e des voix lors du vote. Toutefois, le résultat de cette élection reste incertain, car la gauche a déjà exprimé son intention de voter contre cette nomination, et le Rassemblement National exprime des critiques à son égard. Du côté des Républicains, les députés ont unanimement décidé de s’opposer à cette candidature. Cependant, leur influence est limitée comparée à celle des sénateurs. En effet, seuls six députés LR siègent à la Commission des lois à l’Assemblée nationale, contre 18 sénateurs au sein de la commission équivalente au Sénat.
« Les députés ont leur indépendance, et nous aussi », déclare un sénateur, visiblement irrité par le fait que la compétition autour de la présidence des Républicains s’invite dans le processus de nomination pour le Conseil constitutionnel. « Laurent Wauquiez souhaite marquer sa présence », observe un autre sénateur, notant que le chef des députés LR cherche à garder ses distances avec le gouvernement, se vantant de son indépendance pour défier le ministre de l’Intérieur. Bruno Retailleau, quant à lui, ne s’engage pas publiquement, invoquant la nécessité de respecter la séparation des pouvoirs.
Le sénateur Stéphane Le Rudulier commente : « C’est de bonne guerre, mais si c’est le seul axe de campagne, cela pourrait s’avérer insuffisant face à l’élan de Bruno Retailleau”. Un proche du ministre de l’Intérieur confie : « Il existe un minimum de loyauté envers Macron », avant d’ajouter que « nous n’intervenons pas ».
« Un accueil mitigé »
Au Sénat, contrairement à l’Assemblée nationale, le groupe Les Républicains n’a pas émis de directive de vote explicite. Toutefois, la tendance n’est pas favorable à Richard Ferrand. Le sénateur Stéphane Le Rudulier explique : « Il y a beaucoup de réserves, ce qui est compréhensible. On sait que c’est un intime du président de la République », précise-t-il. Cependant, il attend avec impatience l’audition de Ferrand : « On discute beaucoup de l’État de droit, et du pouvoir des juges. Plusieurs décisions du Conseil constitutionnel ont été mal comprises, notamment la loi sur l’immigration ».
Cette loi, largement réprimandée par le Conseil constitutionnel, reste un souvenir cuisant pour les sénateurs LR qui avaient largement contribué à sa rédaction. « Je souhaite comprendre l’opinion de Richard Ferrand sur ces jugements, poursuit Stéphane Le Rudulier. On verra s’il réussit à convaincre quelques-uns de mes pairs, ainsi que moi-même ».
La sénatrice Jacqueline Eustache-Brinio, quant à elle, a déjà affirmé qu’elle sera « intrinsèquement » opposée. Elle fait partie des 18 sénateurs qui voteront, et elle est ferme dans sa position. « Je voterai contre, sans la moindre hésitation », affirme-t-elle. Pour elle, « cette nomination est entachée de favoritisme envers le président », mais il ne s’agit pas de la seule raison. « Je m’interroge sur les capacités de Richard Ferrand à assumer un tel rôle. Ces compromis surréalistes n’aideront pas à rétablir la confiance des citoyens envers la classe politique ».
Cette attitude généralement réservée, voire hostile, des parlementaires LR pourrait fragiliser davantage l’alliance avec le bloc présidentiel.