À l’approche de l’assemblée générale des évêques en France, France Inter a mené une recherche approfondie sur les cas d’abus sexuels dans chaque diocèse. Cette enquête a permis d’examiner le parcours de chaque évêque pour comprendre comment ils réagissent aux signalements, reçoivent les témoignages ou soutiennent les personnes ayant subi des abus.
Après avoir reçu des signalements concernant des abus sexuels commis par un ou plusieurs prêtres appartenant à leur diocèse, au moins 18 évêques n’ont pas apporté la réponse adéquate attendue par les victimes. C’est ce qui ressort d’une enquête menée par France Inter et publiée ce vendredi 28 mars, juste avant l’assemblée plénière des évêques de France qui doit se tenir à Lourdes.
Pour cette enquête, France Inter a scruté les cas d’abus sexuels dans chaque diocèse, retraçant le parcours de chaque évêque pour comprendre comment ils traitent les alertes qui leur parviennent, accueillent les témoignages ou soutiennent les victimes. Les faits recueillis révèlent des comportements allant de la maladresse à la dissimulation délibérée d’informations, ou encore l’inaction. On apprend que, lors de rencontres à l’évêché, certaines victimes sont parfois mal reçues, que des évêques ignorent les courriers des victimes, en dissuadent certaines de saisir la justice, ou bien laissent en fonction des prêtres pourtant signalés.
De nombreux signalements ignorés
C’est notamment le cas de l’évêque d’Autun, Chalon-sur-Saône et Mâcon, Benoît Rivière, accusé de n’avoir rien fait face à plusieurs signalements concernant certains prêtres de son diocèse. Des membres de la paroisse affirment avoir dû faire appel à la justice ou à la gendarmerie eux-mêmes, suite à des soupçons visant au moins trois prêtres, en raison de l’inaction de leur évêque. Deux prêtres sont décédés avant que la justice n’intervienne. Pour un troisième, une plainte a été déposée par les parents d’une fillette en 2021, et une enquête est en cours. Benoît Rivière, contacté dans le cadre de cette enquête, a affirmé que des mesures conservatoires avaient été mises en place à partir du 2 août 2024, interdisant notamment à ce prêtre d’intervenir dans une école.
Un autre cas est celui d’un prêtre du diocèse d’Aix-et-Arles pour lequel plusieurs signalements ont été effectués. Les premières alertes datent du début des années 2010, et une enquête préliminaire avait été ouverte en 2014. Celle-ci a été classée sans suite, les témoignages de prêtres, paroissiens, et autres proches du diocèse ayant été négligés par l’évêque de l’époque, Mgr Dufour. Aujourd’hui, ce prêtre travaille toujours en contact direct avec des jeunes et figure encore sur la liste des nominations de 2024, signée de l’évêque Christian Delarbre, qui est en poste depuis 2022.
À l’été 2023, la cellule d’écoute de ce diocèse a été contactée par la présidente de l’association Ecclésia Johannis, une organisation aidant les victimes d’abus au sein de l’Église, préoccupée par le cas de ce prêtre travaillant avec des mineurs. La réponse concernant cette affaire spécifique n’a jamais été fournie, mais un courriel de cette cellule s’est terminé de manière menaçante : « Il est rappelé que toute allégation ayant le caractère d’une diffamation publique ou privée (…) est susceptible de poursuites et d’engagement de votre responsabilité pénale.« . Christian Delarbre n’a pas répondu aux demandes d’éclaircissements.