Lancée le 14 février dernier, la deuxième saison de « Bref. » s’est démarquée par sa manière d’aborder des sujets sérieux et réfléchis comme le deuil, les relations malsaines, et l’isolement. La manière dont la série a traité ces thèmes a eu un impact significatif sur de nombreux téléspectateurs, poussant plusieurs d’entre eux à en discuter avec leur thérapeute.
Le début de cette année a été marqué par un véritable triomphe français dans le domaine des séries télévisées. La deuxième saison de Bref, lancée le 14 février dernier, fait son retour sur Canal+ treize ans après la diffusion initiale de sa première saison. Cette série nous plonge dans le quotidien d’un quadragénaire en difficulté, sans travail ni vie sentimentale, qui tente de retrouver un équilibre dans sa vie.
Avec son humour tranchant, la série présente en même temps des aspects profondément tragiques. Au cœur de cette saison, scénarisée par Kyan Khojandi et Bruno Muschio, on trouve des sujets très sérieux. Depuis sa diffusion, ces dernières semaines, le programme a alimenté les discussions dans de nombreux cabinets de psychologie.
« Suis-je similaire à ce personnage? »
Tant pendant ses téléconsultations que dans son bureau à Meudon, dans le département des Hauts-de-Seine, la psychologue clinicienne Roxane Kaniuk a remarqué que la série était devenue un sujet de conversation fréquent, juste une semaine après sa sortie. « Des patients m’en ont parlé à plusieurs reprises. Il n’est pas rare qu’on me cite des films ou des œuvres auxquelles ils ont pensé. Cependant, que trois d’entre eux mentionnent cette série en une seule semaine, c’est inédit pour moi« , confie-t-elle.
Lors des séances, la série Bref pousse les patients à explorer des thèmes autour de leurs relations avec autrui.
« Ils se demandent : ‘À quel point ai-je pu être nuisible sans le vouloir dans mes amitiés ou relations amoureuses ?’
Roxane Kaniuk, psychologue clinicienneà 42mag.fr
« Cela mène à des questionnements : si une situation semblable se représentait, la gérerais-je différemment ? », ajoute-t-elle.
Une autre psychologue, située dans le 13ème arrondissement de Paris, note que « cette deuxième saison a aussi suscité des interrogations chez plusieurs autres patients, et certains en sont plutôt troublés. Néanmoins, tous voient cela comme une opportunité pour réfléchir davantage. »
Selon Michaël Stora, psychologue et psychanalyste, le grand attrait de la série réside dans sa capacité à permettre au public de s’identifier au protagoniste central. « Le personnage principal de ‘Bref 1’ est très introverti, souffrant de ce qu’on décrit comme un narcissisme négatif, se complaisant dans un rôle de victime sans considérer l’autre. C’est une série captivante car, en tant que cliniciens, nous rencontrons justement des patients bloqués dans ce type de souffrances narcissiques. Finalement, cette deuxième saison repose la question fondamentale : ‘qu’est-ce qu’une relation avec autrui ?’ et montre comment la différence nous rappelle que celle-ci est essentielle à toute relation ».
« Le dilemme de Bref. 2 »
Pour certains experts, un potentiel écueil pour ceux ayant ressenti un « éveil » après avoir vu la série, serait de se cantonner à cette perception. Barbara Chamard, thérapeute spécialisée dans la maîtrise des émotions et animatrice d’une chaîne YouTube sur ces thématiques, émet des réserves sur ce qu’elle appelle « le dilemme de Bref. 2 ».
« En psychologie, il y a un phénomène bien connu, appelé le biais de compréhension. Une fois que nous avons mis des mots sur un comportement ou un schéma psychologique, notre cerveau a l’impression de progresser. Comprendre est effectivement une première étape essentielle, car cela éclaire les zones d’ombre. Le piège, cependant, c’est que cette compréhension peut nous donner une fausse impression d’accomplissement, alors que le véritable défi est d’utiliser cette prise de conscience pour entamer des changements concrets. Or, il n’est pas si simple de prendre cette voie quand on croit avoir atteint la sérénité grâce à cette compréhension », explique-t-elle.
Dans le passé, d’autres productions, comme la série En Thérapie, sont souvent évoquées dans les discussions thérapeutiques, souligne Michaël Stora. De même, Vice-Versa, un film d’animation Pixar, est souvent cité pour sa représentation des processus émotionnels.