La vice-présidente du MoDem, qui a auparavant été à la tête d’un ministère spécialisé sur cette question au sein du gouvernement Attal, jouit de la confiance unanime de nombreuses associations. Cependant, ces dernières souhaitent maintenant évaluer sa compétence à agir concrètement et à mesurer son « influence politique véritable ».
Nominations attendues et critiques
Depuis quelques semaines, la nomination de Sarah El Haïry était pressentie. Ancienne ministre, elle a été désignée à la tête d’un nouvel organisme voué à l’enfance, comme l’a rapporté 42mag.fr le mercredi 5 mars. Cette nomination a été officialisée par un décret en Conseil des ministres, où elle figure aux côtés de Catherine Vautrin, la ministre des Familles. Cette décision survient après de vives critiques de diverses associations qui déploraient l’absence d’un ministère spécifiquement dédié à l’enfance dans le gouvernement de François Bayrou.
Sarah El Haïry, ayant déjà occupé des responsabilités similaires (Enfance, Jeunesse et Familles) sous le gouvernement Attal, a été choisie pour ce rôle. Avant cela, elle a soutenu le projet du Service national universel (SNU) en tant que secrétaire d’État à la Jeunesse sous le gouvernement Borne. Elle est aussi vice-présidente du MoDem et se considère, selon Le Point, comme un « bébé Bayrou ». Elle entretient également des relations avec le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, avec qui elle a partagé une liste d’union dans les Pays de la Loire lors des régionales de 2015.
La trajectoire très politique de Sarah El Haïry suscite des interrogations parmi les militants des droits de l’enfant. Claire Bourdille, à la tête du Collectif enfantiste, s’interroge : « Pourquoi nommer une personne aussi proche du gouvernement actuel cela n’assure-t-il pas la pérennité de cette nouvelle entité ? ». Avec d’autres, elle avait proposé Edouard Durand, ancien juge pour enfants, pour ce poste dans une tribune à Libération, justifiant que ce dernier avait gagné la confiance du public.
Considérations du secteur associatif
Malgré quelques critiques, de nombreuses associations accueillent favorablement la nomination de Sarah El Haïry. Elles soulignent son écoute attentive. Martine Brousse, présidente de La Voix de l’enfant, estime que c’est « la personne la plus apte à remplir ce rôle actuellement », rappelant son engagement et sa vision concernant la protection de l’enfance. Martine Brousse, qui a soutenu Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle en 2022, plaide depuis longtemps pour la création d’un haut-commissariat à l’enfance.
La Ciivise, dans un rapport délivré au gouvernement, encourage la nouvelle haute-commissaire à établir une collaboration immédiate pour développer une politique de protection des enfants plus robuste. Joëlle Sicamois, de la Fondation pour l’enfance, partage cet optimisme, évoquant l’intérêt de Sarah El Haïry pour les questions enfants. Même Lyes Louffok, un militant des droits des enfants ayant été candidat sous l’étiquette LFI en Isère, se souvient de relations de travail constructives avec elle.
Au-delà de ce contexte, Lyes Louffok rappelle que Sarah El Haïry avait, dès qu’elle a pris ses fonctions, affiché sa volonté de collaborer avec ceux venus du terrain. Il note aussi qu’elle reste attentive aux problématiques soulevées par la société civile, ce qui augure une collaboration possible, même si Sarah El Haïry semble déjà se préparer pour les élections municipales de Nantes en 2026, un fait relevé par Médiacités.
Potentielles divergences
Les aspirations politiques de Sarah El Haïry pourraient-elles nuire à ses relations avec les acteurs de l’enfance ? Lyes Louffok en prévient le danger : « Nommer un haut-commissaire, c’est pour un engagement durable. Si elle devait quitter son poste prématurément face aux enjeux historiques de l’enfance, ce serait une trahison ». La vigilance quant à ses décisions demeurera, soutient-il.
Sous le gouvernement précédent, ses positions ont suscité des débats, notamment sur le wokisme ou la laïcité. Joëlle Sicamois admet qu’il pourrait y avoir des désaccords sur certains sujets. En avril, Sarah El Haïry avait plaidé pour un renforcement de l’autorité face à la violence juvénile. Toutefois, Sicamois estime qu’il ne faut pas simplement sanctionner les actes violents, proposant plutôt des mesures de soutien pour la parentalité. Lyes Louffok s’interroge sur la politique de l’enfance que Sarah El Haïry souhaite promouvoir, critiquant que les réflexions gouvernementales soient souvent réactives à des drames médiatiques.
Défis et perspectives de la nouvelle structure
La capacité d’action du haut-commissariat est un sujet crucial. Un décret daté du 11 février énumère des missions variées, incluant la santé des enfants et le soutien à la parentalité. Joëlle Sicamois se réjouit de ce large éventail de responsabilités, mais questionne le poids politique effectif du haut-commissariat et ses ressources.
Avec des secteurs aussi étendus que ceux couverts par Catherine Vautrin (Travail, Santé, Solidarités et Familles), Sicamois s’interroge sur l’attention réelle que l’enfance pourra recevoir parmi ces priorités. De son côté, Lyes Louffok voit le poste de haut-commissaire comme essentiellement symbolique, avec des pouvoirs limités face aux ministères de la Justice ou de l’Économie.
Face à ces incertitudes, les associations continuent de revendiquer la création d’un ministère délégué exclusivement à l’enfance, plaidant pour un ministère majeur qui aborderait toute la problématique liée aux enfants, de l’éducation à la protection contre les abus.