Dans l’émission Tout Public diffusée le lundi 3 mars 2025, le succès d’“Anora” est exploré à travers la perspective de son distributeur en France. Également abordé, Éric Ruf parle de sa toute nouvelle création avant de laisser sa place à la tête de la Comédie française.
L’œuvre cinématographique indépendante Anora, réalisée avec un budget modeste de 6 millions de dollars et le dévouement total de son équipe, comprenant « le sang, la sueur et les larmes », a remporté cinq Oscars à Hollywood le dimanche 2 mars. Le film avait déjà remporté la prestigieuse Palme d’or au Festival de Cannes.
D’après Jean Labadie, le distributeur français du long métrage, cette victoire s’apparente à un hommage à l’artisanat, à l’autonomie, à la détermination, à la bonté et à l’engagement. C’est un événement inédit pour le cinéaste Sean Baker, dont les trois précédents films n’avaient pas captivé le public de la même manière. Labadie souligne qu’aucun réalisateur n’avait jusque-là obtenu autant d’Oscars en une seule cérémonie pour un même film. En décrochant les distinctions du meilleur réalisateur, du meilleur scénario original, du meilleur montage et du meilleur film, Sean Baker s’est imposé lors de cette soirée mémorable. Dans son discours, il a rendu hommage au cinéma indépendant, soulignant le rôle crucial des salles de cinéma et des distributeurs.
« En France, nous avons la chance de bénéficier de distributeurs qui osent et font preuve de diversité dans leurs choix politiques et esthétiques, face à un manque de diversité parmi les distributeurs américains indépendants. »
Jean Labadieà 42mag.fr
Cependant, le succès d’Anora a laissé un goût amer à Jacques Audiard, qui est reparti de Los Angeles les mains vides. Bien que son film ait été pressenti pour triompher lors de la cérémonie, il a été freiné par des controverses entourant l’actrice principale. Selon Jean Labadie, malgré cette déception, le cinéma français demeure robuste et audacieux.
Un autre moment marquant des Oscars 2025 a été la récompense du meilleur documentaire attribuée à Basel Adra, Hamdan Ballal, Yuval Abraham et Rachel Szor pour No Other Land. Ce film, réalisé par un groupe d’activistes israélo-palestiniens, raconte l’histoire de l’amitié entre un jeune résistant palestinien luttant contre le déplacement de son peuple et un journaliste israélien qui le soutient. Bien que le documentaire ait fait sensation avec son appel à « agir pour mettre fin aux injustices » et en mettant en lumière l’interconnexion des destins, il n’a pas été diffusé aux États-Unis en raison de l’absence de distributeur, un problème récurrent aux États-Unis selon Jean Labadie.
Éric Ruf et la fin d’une ère à la Comédie Française
Membre de la Comédie française depuis 1993, Éric Ruf est à la tête de l’institution depuis 2014, et son mandat s’achèvera en août. Sous son administration, la maison de Molière a connu un apaisement, une ouverture internationale et une mixité réussie entre les classiques et le contemporain. Il cèdera sa place à Clément Hervieu-Léger, un autre habitué de la Comédie Française. Lors d’une interview sur Tout Public, Ruf s’est dit rassuré par cette transition, tout en exprimant son inquiétude face à un avenir culturel incertain dans un contexte de restrictions budgétaires importantes. Malgré cela, il continue de considérer le théâtre comme un processus d’« ancrage dans un monde en perpétuel mouvement qui ne se projette plus vers l’avenir ».
« Les seuls budgets que l’on peut facilement réduire sont ceux de la culture. »
Eric Rufà 42mag.fr
Avant son départ, Eric Ruf met en scène un marathon théâtral interactif de sept heures mettant en vedette Marina Hands dans la pièce Le Soulier de satin de Paul Claudel.
Le Soulier de satin sera joué à la Comédie Française jusqu’au 13 avril 2025.
Cette émission inclut des reportages de Thierry Fiorile et Matteu Maestracci, journalistes pour le service culture de 42mag.fr.