À la suite de cet événement hivernal tragique, avant même que les raisons du drame ne soient connues, Bruno Retailleau, occupant le poste de ministre de l’Intérieur et engagé dans la course à la présidence des Républicains, a particulièrement fait parler de lui.
Ce jeudi 24 avril, une attaque tragique survenue dans un lycée à Nantes a suscité une profonde émotion au sein de la sphère politique. Cette émotion a été ressentie par le président de la République ainsi que par des élus de tous partis politiques. Pourtant, en moins de deux heures, le débat politique s’est ravivé.
Deux axes de réflexion principaux se dessinent. Le premier, prévisible, concerne la prolifération des armes blanches. Deux incidents récents, l’un à Paris et l’autre dans l’Essonne, avaient déjà poussé les autorités à instaurer des mesures en mars. Jeudi, François Bayrou est allé plus loin, demandant un renforcement des contrôles et la mise en sécurité accrue des institutions scolaires, et promettant de nouvelles propositions concrètes dans un délai de quatre semaines.
L’intervention inappropriée de Bruno Retailleau
Il arrive parfois que l’on reproche aux politiques de légiférer à chaud, sous l’emprise de l’émotion. Toutefois, cette pratique a toujours existé et s’avère souvent nécessaire pour apaiser l’opinion publique. Le problème des armes blanches constitue une réalité inquiétante que le gouvernement ne peut ignorer. Contre toute attente, Bruno Retailleau a adopté un autre angle d’approche.
D’après le ministre de l’Intérieur, l’incident tragique de Nantes « ne relève pas du simple fait divers, mais d’un fait de société« , illustrant un « ensauvagement » généralisé. Pourquoi ? Car, selon lui, nous vivons dans une société qui a favorisé l’indulgence, voulu déconstruire les règles, l’autorité, l’ordre établi et les hiérarchies, aboutissant ainsi à une explosion de violence. Cela rappelle le discours de Nicolas Sarkozy en 2007, lorsqu’il promettait de « liquider l’héritage de Mai 68« . Probablement parce que Bruno Retailleau, également en lice pour la présidence de LR, cherchait à se démarquer dans le contexte de la compétition avec Laurent Wauquiez. Résultat : une intervention déplacée.
La santé mentale plutôt que le discours sur le « laxisme »
Par ses mots, le ministre de l’Intérieur semblait clore une enquête à peine entamée. Pourtant, les premières observations indiquent que l’agresseur pourrait souffrir de « troubles psychiques« . Avant d’agir, il avait envoyé à l’ensemble de l’établissement un long manifeste, une diatribe désordonnée dénonçant la « mondialisation » qui aurait « transformé notre système en une machine à décomposer l’humain« , exprimant son inquiétude quant à un « écocide globalisé« , et critiquant un « conditionnement social totalitaire« . Plusieurs de ses camarades ont d’ailleurs rapporté qu’il évoquait souvent Hitler et « l’idéologie nazie« .
Quel lien avec une société prétendument laxiste et destructrice des interdits ? Au lieu de s’adonner à des prévisions apocalyptiques pour séduire les membres de LR, un ministre sérieux ferait mieux de mettre en lumière une véritable problématique taboue : l’état de santé mentale précaire d’une partie de notre jeunesse, une urgence sanitaire négligée depuis trop longtemps par nos dirigeants.