La cheffe du Rassemblement National pourrait bien suivre l’exemple de Donald Trump en se positionnant comme la cible d’une machination orchestrée par les élites, avec l’objectif de mobiliser sa base électorale et de séduire de nouveaux votants, selon une analyse du journal britannique « Financial Times ».
Un verdict qui bouleverse la scène politique française
Après que Marine Le Pen a été condamnée pour avoir détourné des fonds publics, le lundi 31 mars, la presse internationale, particulièrement en Europe, n’est pas restée silencieuse face à cette nouvelle qui, selon le Financial Times, va « secouer le paysage politique français ». La responsable des députés du Rassemblement national se voit infliger une peine de deux années de prison ferme ainsi qu’une interdiction de se représenter à toute élection pendant cinq ans, la rendant inéligible d’entrée de jeu pour la prochaine présidentielle.
Bien que Marine Le Pen ait critiqué ce verdict en déclarant sur TF1 que c’était « un jour sombre pour notre démocratie », le quotidien britannique affirme que « le tribunal a simplement appliqué les règles que doivent suivre les élus ». Des publications internationales, comme Le Soir en Belgique, partagent cette perspective, en soulignant que l’interdiction de Marine Le Pen n’est pas une entorse à la démocratie, mais un reflet de la liberté dont disposent les juges pour agir en conformité avec la séparation des pouvoirs. The Guardian, autre grand journal britannique, note que « la justice française a fait preuve de courage en restant impartiale (…) : pas de passe-droit pour Marine Le Pen, pas de courbette devant les puissants, pas de prétexte électoral pour passer outre la loi ».
Néanmoins, certains médias, en accord avec des figures nationalistes alliées à la députée RN, ont critiqué ce jugement qu’ils estiment injuste. Le journal russe Moskovski Komsomolets, proche du gouvernement, commente qu’il est évident qu’il n’y a rien de démocratique dans cette affaire. En parallèle, le magazine conservateur britannique The Spectator évoque « une judicature spectaculaire qui, intervenant dans la campagne présidentielle française, menace de priver des électeurs de la possibilité de choisir le candidat dominant dans tous les sondages ». « Des débats ont animé les chaînes d’information : la France est-elle encore une démocratie? » précise l’hebdomadaire.
« La plus mauvaise manière d’éliminer Marine Le Pen »
D’après le New York Times, bien que « la France demeure une démocratie gouvernée par l’État de droit, comme le montre ce jugement », le quotidien s’interroge sur l’impact que cela aura sur la société française. « La question reste de savoir si, face à cette tempête politique, la Ve République pourra tenir jusqu’aux élections de 2027″, ajoute-t-il. Le fait qu’ »aucun individu ne soit au-dessus des lois », comme l’a souligné la députée européenne Valérie Hayer, « suscitera certainement des controverses dans un climat où la légitimité des systèmes judiciaires est régulièrement remise en question – en Europe et particulièrement aux États-Unis sous [Donald] Trump », critique le journal. The Economist exprime une opinion similaire, notant que pour les partisans de madame Le Pen, séduits par son discours anti-establishment, ce jugement renforcerait l’impression que le système est partial envers elle.
Der Spiegel, un média allemand, avance que ce jugement est « la pire manière de se débarrasser de Marine Le Pen », affirmant que « Le Pen et son mouvement se posent déjà en victimes d’un supposé complot politico-judiciaire ». Le journal poursuit en notant « Donald Trump nous a montré la voie à suivre. Durant une période où beaucoup se laissent séduire par les théories conspirationnistes populistes de droite, une attaque judiciaire peut se convertir en avantage politique ». Le Financial Times prédit un résultat analogue : Marine Le Pen pourrait bien « émuler Donald Trump en se présentant comme une victime d’un complot des élites, espérant ainsi non seulement renforcer ses soutiens, mais aussi séduire d’autres électeurs mécontents de la présidence d’Emmanuel Macron et des partis traditionnels ».
La députée a annoncé lundi son intention de faire appel de ce jugement. Néanmoins, pour l’instant, le Rassemblement national doit envisager l’avenir sans elle en tant que figure de proue pour la prochaine présidentielle, constituant un moment décisif pour le parti, selon le journal espagnol El Pais : « Après avoir tourné le dos à son passé, exclu son fondateur Jean-Marie Le Pen, et s’être positionné, contre les attentes, en tant que rempart contre l’antisémitisme, le parti pourrait à son grand désespoir finaliser sa transformation en se privant de la constante qu’était le nom Le Pen ». Pour la première fois depuis 1988, ce nom pourrait bien ne pas figurer sur les bulletins de vote présidentiels. D’après le journal italien La Repubblica, « ce patronyme, Le Pen, pourrait bientôt ne plus influer sur la politique française ».