Mercredi, le président de la République a fermement repris ses ministres, notamment Bruno Retailleau, au cours d’un conseil de défense dédié à la question de l’infiltration islamiste sur le territoire français. Il a estimé que les suggestions avancées n’étaient pas suffisamment adaptées à la sévérité de la situation.
Peut mieux faire. C’est avec une certaine froideur qu’Emmanuel Macron a pris connaissance du rapport portant sur les Frères musulmans et l’islamisme politique. Le président de la République avait réuni à ses côtés le Premier ministre François Bayrou ainsi que les ministres concernés, allant de l’Intérieur aux Affaires étrangères, en passant par les Finances, l’Éducation nationale, l’Enseignement supérieur et les Sports.
« Vu l’importance du dossier et la gravité des faits mis en lumière, il a demandé au gouvernement de présenter de nouvelles propositions qui seront examinées lors d’un prochain Conseil de défense début juin », a résumé l’Élysée dans un bref communiqué. En filigrane, le chef de l’État considère que les mesures suggérées sont insuffisantes, voire, selon une source, carrément « pas sérieuses ».
Fuites dans les médias et absence de concertation
Le président ne s’est pas seulement montré déçu par le contenu des propositions formulées : il a également exprimé son agacement face à un « problème de méthode » ainsi qu’aux « fuites » dans la presse concernant ce rapport qu’il avait lui-même commandité en 2024. Il a sévèrement critiqué les responsables présents autour de la table, notamment Bruno Retailleau. « L’atmosphère était tendue et il s’est emporté contre certains ministres au sujet de la préparation de cette réunion et des fuites qui ont précédé », rapporte une source ministérielle. « Il y a eu un moment un peu brutal, mais ce n’était pas ciblé spécialement contre Retailleau », nuance une autre.
Par ailleurs, Gérald Darmanin a aussi été rappelé à l’ordre : le ministre de l’Intérieur a été pointé du doigt à cause de sa proposition non concertée de construire une prison de haute sécurité en Guyane, destinée à héberger un quartier spécial dédié à la lutte contre le narcotrafic. « Entre un rapport classifié qui fuit au bon moment et une annonce de prison de haute sécurité sortie de nulle part (…) franchement, ce n’est pas sérieux », a déploré une source proche du président auprès de l’AFP.
Très loin de rester passif, le ministre de l’Intérieur a répliqué en défendant vigoureusement ses idées devant le Sénat : Bruno Retailleau affirme vouloir la mise en place d’un « véritable chef de file du renseignement », ainsi que la création d’un « parquet administratif » rattaché au ministère de l’Intérieur pour simplifier les dissolutions d’organisations à caractère islamiste.
De leur côté, les partis d’opposition ont rapidement réagi en dénonçant un rapport « contreproductif », « manquant de sincérité » voire « islamophobe ».