Un conseiller municipal récemment élu, ayant suivi une formation dans une grande école de commerce, a eu l’initiative de se lancer dans un tour de France des maires. Son objectif est de recueillir et de transmettre les projets locaux efficaces qu’ils mettent en place, afin de diffuser des solutions concrètes qui facilitent la vie des habitants.
La richesse du talent en France s’étend également à ses maires, comme l’a souhaité démontrer un jeune homme de 24 ans. Raphaël Ruegger est cofondateur de la très sérieuse « Fédération française des trucs qui marchent ». 42mag.fr s’est joint à lui pour suivre son périple à travers le pays à la découverte d’initiatives locales réussies.
Depuis trois ans, Raphaël Ruegger sillonne la France pour mettre en lumière des actions locales efficaces et reproductibles ailleurs. Cette semaine, il a fait une halte près de Dijon, dans la commune de Chevigny-Saint-Sauveur, qui compte 11 000 habitants. Ce matin-là, il accompagne le maire… chez le coiffeur, une visite qui n’est pas anodine.
Un « sentiment de fierté »
Le maire, Guillaume Ruet, tenait en effet à faire découvrir à Raphaël une initiative locale : un carnet de chèques de réduction à utiliser dans les commerces du centre-ville. « Lors des confinements, nous voulions soutenir les commerçants locaux en difficulté. Puis j’ai reçu un carnet de chèques venant d’une grande galerie commerciale proche de Chevigny, et je me suis demandé pourquoi ne pas proposer quelque chose de similaire pour nos commerces de proximité, » explique-t-il.
Ce sont désormais environ 11 000 carnets qui ont été distribués par la mairie, avec des résultats probants. Par exemple, ce coiffeur a vu une quarantaine de nouveaux clients grâce à cette opération. « C’est encourageant de constater l’implication des élus auprès des petites entreprises, » salue le chef d’entreprise local. Cette idée a même séduit les municipalités voisines, qui l’ont adoptée. Une preuve concrète pour Raphaël, cofondateur de la Fédération française des trucs qui marchent : « À bien des égards, les maires sont des entrepreneurs dans leur manière de créer et développer leurs communes. Voir que leurs initiatives peuvent dépasser les frontières locales pour s’exporter à l’échelle nationale représente une véritable fierté, même si la modestie reste souvent leur marque de fabrique. »
« Les maires ont parfois du mal à reconnaître l’ampleur de ce qu’ils accomplissent, mais c’est tant mieux : c’est notre rôle de le faire à leur place ! »
Raphaël, cofondateur de la Fédération française des trucs qui marchentdans un entretien à 42mag.fr

Ancien étudiant de l’ESSEC, prestigieuse école de commerce parisienne, Raphaël affiche encore un visage presque juvénile. Sa passion est toutefois bien ancrée dans l’action locale. Cette vocation ne s’est pas imposée par hasard. « Je suis élu local à Neuvy-sur-Barangeon, dans le Cher. En tant que jeune élu, j’entendais souvent que c’était compliqué, que ça ne marchait pas, ou qu’on ne savait pas comment procéder. J’ai eu envie d’entamer un tour de France pour rencontrer maires, adjoints et conseillers municipaux, » explique-t-il.
« Durant un stage chez le cabinet Evidence, j’ai travaillé avec ses fondateurs, Grégoire Bourgeois et Christophe Arnoux, qui ont ensemble pensé la création de la Fédération française des trucs qui marchent. C’est un projet sérieux, car il traite des problèmes en proposant surtout des solutions que d’autres peuvent adopter, » ajoute-t-il.
Une réponse concrète à un besoin réel
Au début, il reconnaît que la démarche n’était pas simple et qu’on lui raccrochait parfois au nez. Mais trois ans plus tard, les rôles s’inversent : ce sont maintenant les maires qui le contactent directement. L’an dernier, l’association a réuni 1 500 personnes aux Folies Bergères à Paris, à la veille du Salon des maires, et la prochaine rencontre est prévue pour le 17 novembre au Cirque d’hiver. Le bilan est positif : un ouvrage est en préparation, des partenaires soutiennent le projet avec un budget annuel avoisinant les 250 000 euros, et les comptes sont presque équilibrés. L’association vient également d’embaucher un nouveau collaborateur, Théo Caviézel, 28 ans, rencontré lors de l’un des périples de Raphaël.
À Talant, une autre ville de 12 000 habitants à proximité de Dijon, Raphaël et Théo accompagnent le maire Fabian Ruinet sur une aire de jeux aménagée pour les enfants en fauteuil roulant. « Les personnes valides peuvent s’asseoir sur un banc à l’extérieur du cercle, tandis qu’un fauteuil roulant peut prendre place au centre pour que tous puissent tourner sur ce tourniquet au niveau du sol, » décrit le maire. « À voir cela, on se demande comment on pourrait faire autrement, » souligne Théo. « Pour les personnes en situation de handicap, le plus difficile est d’affronter ce qui leur est impossible, » complète l’élu.
« Cet exemple permet aussi de mettre en lumière des sujets souvent négligés ou oubliés par les politiques publiques. »
Théoà 42mag.fr
« Même si cette installation a coûté 400 000 euros, ce n’est pas quelque chose qui s’improvise en un jour, mais cela répond à un réel besoin. Je suis convaincu que si on montre ce type d’aménagement aux élus, ils en seront inspirés. Ils adapteront cela à leurs moyens, mais c’est un thème qu’il faut absolument aborder, » insiste Théo.
D’autres actions telles que les passeports citoyens invitant les jeunes à s’engager dans des initiatives solidaires, des services de bus sur demande, ou encore un magazine municipal consacré à la lutte contre les violences faites aux femmes, figurent parmi ces « trucs qui marchent ». L’objectif pour Raphaël Ruegger est désormais tourné vers l’année 2026 et les élections municipales. « Il y aura un demi-million de nouveaux élus. Nous devons d’abord les encourager à se présenter, car ce n’est pas toujours évident. Ensuite, nourrir leurs programmes et enfin préparer l’avenir, car lorsque le pays et ses institutions font face à des blocages, c’est au niveau local que le relais doit se faire. La Fédération des trucs qui marchent, au-delà de son nom ludique, incarne une vraie révolution permettant de pratiquer la politique autrement, » avance Raphaël. En attendant, leur tour de France se poursuit, avec une prochaine étape prévue dans le Grand Est.