Bien que les tarifs proposés soient attractifs et que certains considèrent la compétition comme inéquitable, l’industrie chinoise des véhicules électriques ne possède pas la robustesse que l’on pourrait lui attribuer. À ce titre, BYD, principal acteur du secteur, fait l’objet de doutes de la part de la Commission européenne, qui suspecte que son succès repose en partie sur des aides financières publiques. Par ailleurs, il semblerait que cette entreprise ait accumulé des dettes importantes auprès de ses différents fournisseurs.
Des véhicules à la pointe de la technologie et des tarifs très compétitifs qui mettent la pression sur leurs rivaux : voilà comment se présente la voiture électrique venue de Chine, portée notamment par le géant BYD. Mais ce positionnement à bas coût est-il réellement pérenne ? Sur les réseaux sociaux, certaines voix critiques, comme celle d’une militante chinoise, expriment leurs réserves : « Cette politique commerciale ne pourra pas durer indéfiniment. L’ensemble de la firme pourrait s’effondrer du jour au lendemain, entraînant dans sa chute toute l’industrie chinoise des voitures électriques. »
Alors, ce modèle est-il sur de faibles bases ? Pour y répondre, nous avons étudié les résultats financiers de BYD, l’un des poids lourds chinois du secteur. L’an passé, l’entreprise a dégagé un bénéfice net de 40 milliards de yuans, équivalant à environ 4,7 milliards d’euros, soit plus du double de ce qu’elle avait réalisé en 2022. Le modèle s’avère donc rentable. Reste à savoir si cette rentabilité ne serait pas artificiellement soutenue par des aides publiques nombreuses. C’est en tout cas ce que soupçonne Bruxelles, qui a lancé une enquête pour examiner la question. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, déclare ainsi : « Les prix des voitures chinoises sont maintenus à un niveau artificiellement bas grâce à des subventions massives de l’État. Cela fausse la concurrence sur notre marché. »
Un avenir lié aux marchés européens ?
Selon l’Institut Kiel pour l’Économie mondiale, BYD aurait bénéficié d’aides étatiques à hauteur de 3,4 milliards d’euros entre 2018 et 2022. Mais ce ne sont pas uniquement les subventions qui interrogent. D’après les analyses du cabinet GMT Research, cette progression spectaculaire de BYD reposerait aussi sur une importante dette envers ses fournisseurs, qui serait en réalité dix fois plus élevée que ce que l’entreprise l’annonce officiellement. Nigel Stevenson, analyste chez GMT Research, précise : « BYD retarde ses paiements aux fabricants pendant six mois ou davantage, ce qui constitue une forme de financement à faible coût. Cette tactique améliore leur trésorerie et donne l’illusion d’une solidité financière plus grande qu’elle n’est en vérité. »
Par ailleurs, les experts soulignent que la compétition dans le secteur est extrêmement intense. Face à une production chinoise qui dépasse largement la demande locale, les constructeurs n’hésitent pas à réduire drastiquement leurs prix pour écouler leurs stocks. Cette situation pourrait nuire à la santé globale de l’industrie automobile à moyen et long terme. Flavien Neuvy, économiste et directeur de l’Observatoire Cetelem, explique : « Dans les prochaines années, on assiste en Chine à une concentration du secteur. Il y a énormément de marques en concurrence, et on va observer une forme de sélection naturelle, où certains acteurs seront rachetés par d’autres. » Ainsi, bien que prospérant actuellement, le secteur chinois des voitures électriques demeure plus vulnérable qu’il n’y paraît, à tel point qu’il mise désormais sur la conquête du marché européen pour assurer sa pérennité.