Vendredi dernier, le chef d’état-major des armées françaises déclarait que la Russie considérait désormais la France comme son principal rival sur le continent européen. En réaction à cette déclaration, Emmanuel Macron a pris la parole dimanche pour annoncer une intensification de l’ »effort de guerre », appelant les parlementaires à assumer pleinement leur rôle et leurs responsabilités dans ce contexte de tension accrue.
Lors de son adresse aux forces armées dimanche 13 juillet, Emmanuel Macron a revêtu son rôle de commandant en chef pour détailler ses intentions concernant le financement de ce qu’il qualifie d’« effort de guerre ». Il a notamment proposé de doubler le budget de la défense sur une période de dix ans, en le faisant passer de 32 milliards d’euros en 2017 à « 64 milliards d’euros en 2027 ».
Pour éviter tout coup de théâtre, la présidence avait soigneusement préparé le terrain auprès des médias dans les jours précédant ce discours. Le général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées, avait lui-même amorcé cette anticipation dès le vendredi 11 juillet, en rappelant que Moscou considérait ouvertement la France comme « son principal adversaire en Europe ». De son côté, Sébastien Lecornu, ministre des Armées, s’était exprimé dans La Tribune Dimanche, quelques heures avant l’allocution solennelle et grave prononcée par Emmanuel Macron depuis les jardins de l’hôtel de Brienne.
Les nouveaux champs de bataille
Si la « menace russe existentielle » figure en tête des raisons invoquées par le chef des Armées pour justifier ce renforcement financier conséquent, il n’en est pas la seule motivation. Emmanuel Macron évoque également les formes inédites de conflits qui se multiplient et auxquelles la France doit désormais faire face : il mentionne notamment l’intelligence artificielle, l’emploi accru des drones, ainsi que l’émergence de nouveaux terrains d’affrontement dans l’espace extra-atmosphérique, le cyberespace ou encore les profondeurs sous-marines.
Le président de la République n’hésite pas à emprunter un vocabulaire guerrier afin d’entretenir une certaine crainte : « Pour conserver notre liberté dans ce monde, il faut inspirer la crainte. Pour inspirer la crainte, il faut être puissants », déclare-t-il. Il poursuit en assénant : « Chacun doit être à son poste de combat » et « à l’heure des prédateurs, personne ne peut rester immobile ».
Cette posture permet à Emmanuel Macron de renouer avec son image de chef de guerre sur la scène nationale tout en s’affirmant à l’international comme un leader de premier plan pour l’Europe. Cependant, en dépit de contraintes budgétaires évidentes, rien n’est encore acquis politiquement, car c’est le Parlement qui devra entériner ces dépenses supplémentaires. Sans majorité absolue, le camp macroniste devra donc déployer des efforts pour rallier des soutiens.
Une ouverture au consensus à l’Assemblée nationale
Il reste incertain que la défense constitue un de ces rares dossiers susceptibles de mobiliser un large consensus à l’Assemblée nationale. Néanmoins, cette question peut fédérer autour d’elle une majorité capable d’approuver des crédits additionnels, avec des soutiens allant du Parti Socialiste au Rassemblement National. C’est dans cette optique qu’Emmanuel Macron a lancé un appel ferme et direct à la responsabilité des parlementaires.
Il faudra cependant persévérer dans la démarche de persuasion, en sachant d’avance que cela semble peine perdue auprès des élus d’extrême gauche. Dès le dimanche soir, La France Insoumise, par la voix d’Éric Coquerel, président de la commission des finances, condamnait le discours « extrêmement belliciste » du président et dénonçait « une course à l’armement au détriment de la lutte contre le changement climatique ».