En tant qu’invité politique sur 42mag.fr ce mercredi 6 août, Ambroise Méjean, secrétaire général délégué de Renaissance, est revenu sur le podcast de François Bayrou concernant le budget 2026.
François Bayrou a lancé une chaîne YouTube et un podcast le mardi 5 août pour présenter le budget 2026. Dans une brève vidéo, premier épisode d’une série, il aborde les enjeux budgétaires et soutient son programme d’économies qui vise 40 milliards d’euros. Ambroise Méjean, secrétaire général délégué de Renaissance, invité politique de 42mag.fr mercredi 6 août, a écouté ce podcast.
Ce texte représente une partie de la retranscription de l’entretien ci-dessus. Pour voir l’entretien dans son intégralité, cliquez sur la vidéo.
Alexandre Peyrout : Le Premier ministre s’est essayé à un nouveau format, le podcast. Au menu, environ huit minutes durant lesquelles il tente d’expliquer son projet budgétaire et son plan d’économies de 40 milliards. Vous l’avez écouté, vous, le Premier ministre ?
Ambroise Méjean : Oui, bien sûr, sur le chemin du retour après les vacances. Je pense que ce choix est pertinent, parce que dans un paysage politique qui manque parfois de nuance et qui aime simplifier, prendre le temps d’expliquer ce qu’il veut faire, et ce, à travers plusieurs épisodes, c’est une initiative positive. Cela me rappelle l’époque de Pierre Mendès France. L’un des précurseurs des causeries radiophoniques, sous la Quatrième République, qui disait une chose que j’apprécie particulièrement : « La démocratie, c’est d’abord un état d’esprit. » En procédant ainsi, le Premier ministre François Bayrou montre que son esprit est celui du dialogue et c’est une bonne chose.
Est-ce que ce n’est pas une méthode discutable, surtout en plein été, quand les Français pensent autre chose ?
Je pense que tenter d’instaurer un dialogue ne coûte pas grand-chose. Si ceux qui nous écoutent ou regardent prennent quelques minutes pour se faire leur opinion, tant mieux : ils se forgeront leur propre point de vue, positif ou négatif. L’important, ce sont les éléments qui permettent de trancher. Souvent, dans le débat public, on se prononce trop vite sur des convictions sans confronter la réalité des contraintes budgétaires. Et c’est exactement ce que le Premier ministre essaie d’apporter, des données pour éclairer le débat. L’objectif est louable et l’on verra si l’exercice porte ses fruits.
La menace d’une motion de censure
La question, c’est aussi de savoir : est-ce que cela suffira à sauver le gouvernement face à la motion de censure à la rentrée ?
C’est une interrogation pertinente à laquelle je ne détient pas la réponse et j’aimerais la connaître. Je crois que le Premier ministre, en présentant son budget, a choisi une approche un peu différente, celle de favoriser le dialogue. Rappelez-vous que lors de l’époque de Michel Barnier, l’absence de discussion avec l’opposition avait facilité la censure. François Bayrou a opté pour une voie distincte, peut-être plus ardue au départ, mais qui permet au moins aux oppositions de débattre des mesures avant l’examen budgétaire.
Pourtant aujourd’hui, les oppositions, qu’il s’agisse du Parti socialiste ou du Rassemblement national, disent ne pas avoir été consultées sur ce budget, présenté le 15 juillet, et cela pourrait les pousser à voter la censure.
Un budget est d’ordinaire dévoilé à l’automne. Là, il a été présenté en juillet afin que les oppositions puissent préparer leurs échanges. L’idée est que ceci constitue un point de départ. Le Premier ministre a rappelé une réalité factuelle que personne ne peut nier : la nécessité de désendetter. Nous avons 3 400 milliards de dettes et il faut faire des efforts collectifs, non pas pour le plaisir, mais pour pouvoir investir dans l’avenir. L’année prochaine, afin que chacun ait bien en tête le chiffre, nous rembourserons davantage de dette que ce que nous allouons à l’Éducation nationale. Ce n’est quand même pas acceptable. Il faut donc que toutes les parties se réunissent. J’invite les oppositions à dire : s’il y a des dépenses que vous ne souhaitez pas réduire ou des recettes que vous aimeriez augmenter, dites-le, proposez-le. Faites des propositions pour que l’effort de 44 milliards d’euros ne soit pas nécessairement celui avancé par le Premier ministre, mais qu’il soit adapté. En tout cas, il faut du dialogue et je pense que le Parti socialiste ne peut pas rester insensible à cette idée de dialogue.
Un effort équitable ?
Mais justement, lorsqu’on parle d’effort, dans ce qui a été présenté par François Bayrou, on voit la lutte contre la fraude sociale et des coupes nettes dans la santé et la fonction publique, mais peu ou pas d’efforts ciblant la fraude fiscale ni d’imposition sur les entreprises. Est-ce réellement équitable ?
Sur la fraude fiscale, ce n’est pas faux que ce n’est pas tout le budget, mais il faut reconnaître que plusieurs plans lancés depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron ont permis de récupérer une part significative des ressources. Avec une meilleure coopération, notamment avec les banques, l’État parvient à récupérer une partie de ces fonds chaque année. Ce n’est pas suffisant et il faut étendre ces efforts pour qu’ils touchent tous les secteurs, afin que la charge financière soit répartie de manière équitable.
Est-ce que, selon vous, cet effort, tel qu’il est présenté par le Premier ministre, est équitablement réparti aujourd’hui ?
Ce que le Premier ministre cherche à faire, c’est d’impliquer l’ensemble des acteurs. Par exemple, il avance un pas supplémentaire par rapport aux gouvernements précédents en demandant une contribution spécifique à certains retraités les plus fortunés, en supprimant l’abattement de 10 % qui leur bénéficiait et en le remplaçant par un forfait de 2 000 euros. Il introduit aussi une contribution exceptionnelle sur les revenus les plus élevés.
Pas à la hauteur des exigences de la gauche aujourd’hui.
Pas au niveau des attentes de la gauche aujourd’hui, mais si l’on répondait exactement à ces demandes, on serait dans une logique politique clairement à gauche. Et cela ne nous a pas échappé : nous ne sommes pas à gauche, car certaines propositions de la gauche pourraient dissuader des investisseurs étrangers. Ce que je souligne, c’est qu’il faut parvenir à un compromis, comme on l’a fait en janvier dernier lorsque François Bayrou est arrivé aux responsabilités. Ce compromis doit être construit avec plusieurs partenaires, et notamment le Parti socialiste, car je ne suis pas convaincu de la volonté du Rassemblement national de dialoguer, mais le PS peut devenir un partenaire avec lequel on peut avancer, même sans être d’accord sur l’essentiel.