En mars dernier, une vidéo a suscité un véritable buzz sur le territoire américain. On y voit Claude Malhuret, sénateur de l’Allier, adresser à Donald Trump des critiques cinglantes au sujet de la guerre en Ukraine, ce qui illustre l’inquiétude des Français qui viennent de voir l’un de leurs principaux alliés vaciller face à la Russie.
« Washington est désormais perçu comme la cour de Néron : un souverain qui met le feu, des courtisans qui se soumettent et un bouffon sous kétamine chargé de l’épuration de la fonction publique ! » Le 4 mars dernier, au Palais du Luxembourg, Claude Malhuret, sénateur de l’Allier, prend la parole lors d’un débat consacré à l’Ukraine. Il livre un réquisitoire pointu contre Donald Trump et son administration, peu après l’humiliation subie par Volodymyr Zelensky dans le bureau ovale. « Néron » dans ce discours désigne Donald Trump et le « bouffon sous kétamine » renvoie à Elon Musk, alors proche allié du président américain.
Par ces propos, Claude Malhuret illustre parfaitement l’inquiétude qui gagne les Européens et, plus encore, les Français, qui voient l’un de leurs principaux alliés vaciller face à Vladimir Poutine. Le sénateur se souvient : « C’était quelques jours après que Trump a convoqué – on ne peut pas dire autre chose – Zelensky dans le bureau ovale, qu’il l’a humilié devant tous les Américains et en fait devant le monde entier. Tout le monde était très en colère. J’étais très en colère. Et quand vous êtes en colère, les formules viennent beaucoup plus facilement. »
Des formules « venues très naturellement »
La vidéo devient virale, notamment aux États‑Unis, grâce à des formules percutantes qui frappent fort. « ‘Bouffon sous kétamine’, ça n’était pas compliqué puisque Musk lui-même avait dit qu’il prenait de la kétamine » précise Claude Malhuret, et d’ailleurs, il suffit de le regarder pour voir qu’il prend quelque chose. Quant à ’empereur incendiaire’, c’est une étiquette qui m’est venue très naturellement parce que Trump est un incendiaire. Je ne dis pas qu’il met le feu à Rome comme Néron, mais il embrase les choses de manière imagée. Certaines tournures exigent un effort, mais celles-ci me viennent tout à fait spontanément. »
La force de l’indignation du sénateur peut aussi être liée à son engagement personnel. L’homme a été, entre autres, président de MSF et secrétaire d’État aux droits de l’homme, et l’attitude de Donald Trump a touché une corde sensible chez lui : « La corde sensible, c’était surtout celle de l’Ukraine », explique-t-il.
« J’ai été choqué, comme tout le monde, par cette image qui restera pendant des années et des années : l’image de l’humiliation de Zelensky, dans le bureau ovale, dans un guet-apens. »
Claude Malhuret, sénateur de l’Allierà 42mag.fr
« Et aujourd’hui, c’est insupportable d’entendre un président américain dire que les Russes sont les agressés et les Ukrainiens les agresseurs, poursuit le sénateur. Retourner la réalité, c’est totalement insupportable. Et d’ailleurs, personne ne l’a supporté. Donc je crois que j’ai réagi comme tout le monde, c’est tout. »
Un écho dans la presse internationale
Dans la foulée, CNN a repris des extraits de ce discours, Claude Malhuret a été interrogé par la BBC et de nombreux journalistes étrangers, notamment des Américains, se sont déplacés pour l’interroger. « La première réflexion qu’ils avaient tous », se souvient-il, c’était une question qu’ils se posaient à eux-mêmes. Ils me l’ont posée, mais ils se la posaient à eux‑mêmes : pourquoi cela n’est‑ce pas un sénateur américain ou un Congressman américain qui dit cela ? C’est exactement ce que tout le monde pense, mais l’impression générale est que personne n’ose le dire ou n’arrive à le dire.
Quant aux multiples recours aux punchlines, Claude Malhuret l’assume pleinement : « Je pense que, si aujourd’hui, vous voulez faire passer des idées dans un discours, vous avez deux nécessités, sinon vous n’êtes pas écouté : la première, c’est la punchline, et la deuxième c’est l’humour. Et si vous ne faites pas sourire les gens, si vous ne touchez pas une corde sensible, comme deux fils électriques qui se touchent, si vous n’arrivez pas à produire une étincelle, vous n’arrivez pas à convaincre, même pas à retenir l’attention. Donc oui, je revendique le fait de me servir à la fois de punchlines, d’humour, d’ironies, parfois même d’un peu de sarcasme à l’égard de tel ou tel. »