Devant chaque période de crise, les deux camps se mesurent et s’opposent avec véhémence. Toutefois, pour progresser, il est nécessaire que leurs forces s’harmonisent et se complètent mutuellement.
Face au dérèglement climatique que chacun peut constater quasi en direct, on peut parler d’une revanche d’une communauté longtemps ignorée, voire malmenée, par des responsables politiques de tous horizons, et aussi par une partie de l’opinion qui, peut-être, refusait d’affronter la réalité.
Les rapports du GIEC ont été posés sur la table depuis de nombreuses années, les travaux des chercheurs s’entassent, et comme l’avait résumé, avec une pointe d’ironie, un homme politique devenu chef de l’État: « Notre habitat est en flammes, et nous détournons le regard ».
Le principal écart entre élus et scientifiques tient peut-être au rapport au temps. Lorsqu’un chercheur évoque 2030, 2050 ou 2100, la réaction première d’un dirigeant est souvent de penser que c’est encore loin. Or, même si la voix des chercheurs est aujourd’hui davantage entendue, la mise en œuvre reste du ressort des élus. Le dernier mot demeure toujours entre les mains du politique. Le rôle des scientifiques n’est pas de trancher les choix, mais d’alerter, de démontrer et de proposer des solutions, des voies d’adaptation. Dans un monde idéal — et l’on peut douter qu’il existe réellement — les deux domaines devraient donc se compléter.
Le mélange des genres devient envisageable
Il peut aussi exister une mixité entre politique et science, d’abord parce qu’un scientifique (et l’on revient à une évidence) est aussi un citoyen. Rien ne l’empêche de s’engager publiquement. Souvenez-vous, en juin 2024 lors des législatives, certains d’entre eux, dont plusieurs lauréats du prix Nobel d’économie, avaient pris position contre le Rassemblement National. Bien sûr, il semble plus simple pour un chercheur de se lancer en politique que pour un élu de redevenir scientifique, et l’inverse paraît parfois plus complexe encore.
En 2021, pendant la crise du Covid, l’un des poids lourds du gouvernement de Jean Castex avait tenu une phrase assez cocasse en parlant d’Emmanuel Macron : « Le président a acquis une vraie expertise sur les sujets sanitaires. Ce n’est pas un sujet inaccessible pour une intelligence comme la sienne ».
Est-on aujourd’hui sorti d’un indispensable va‑et‑vient entre scientifiques et politique? Ce qui est certain, c’est qu’une démocratie a besoin de la complémentarité des deux pour progresser.