Les chiffres issus du panorama national du parc automobile suggèrent une tendance claire: les Français conservent leurs véhicules sur des périodes qui s’allongent de manière marquée. Et cette dynamique se retrouve aussi au moment de l’achat, puisque les voitures ayant déjà connu une première vie trouvent de plus en plus leur place et séduisent un nombre croissant d’acheteurs.
Sur les réseaux sociaux, de nombreux témoignages évoquent une attache quasi viscérale à leur véhicule ancien : des propriétaires déclarent qu’ils ne s’imagineraient jamais s’en séparer, même avec des kilomètres au compteur. Des messages reprennent les mêmes sonorités, comme « j’ai une vieille auto qui a tel nombre de kilomètres et je ne m’en séparerai pour rien au monde », ou « j’ai telle citadine ancienne et je n’en sortirai pas ». De tels récits pullulent, illustrant une relation durable avec des voitures qui ont déjà roulé longtemps.
Pour Gérald Sgobbo, vice-président de la Fédération nationale de l’Automobile (FNA), il ne s’agit pas d’un phénomène marginal : selon lui, c’est une tendance de fond qui s’est renforcée de manière marquée ces quatre dernières années, au point de devenir une réalité largement répandue.
Des garages qui tournent à plein régime
Propriétaire d’un atelier polyvalent dans l’Ariège, cet artisan est en première ligne pour observer ce mouvement. Son activité regroupe réparation mécanique, carrosserie, dépannage et contrôle technique, et il peut affirmer sans hésiter : « on réalise des interventions lourdes qu’on ne pratiquait pas autrefois ».
Une partie croissante de ses clients accepte d’investir des sommes importantes pour remettre en état des véhicules anciens plutôt que d’en acheter des neufs, que ce soit dans un cadre curatif ou préventif. Par exemple, des voitures sujettes à la corrosion sont réparées directement sur le compte du client, sans recours à l’assurance, ce qui peut atteindre près de 4 000 euros. L’objectif est clair pour les usagers : préserver le véhicule et pouvoir circuler en toute sécurité et passer le contrôle technique sans souci, même si cela représente un coût élevé.
« On échange des réparations qui peuvent approcher la valeur du véhicule lui-même. »
Gérald Sgobboà 42mag.fr
Dans son activité de dépanneur, l’artisan observe que « durant l’été notamment, il n’est pas rare de croiser des voitures atteignant les 400 000 kilomètres ». Pour preuve, il cite le cas d’une Peugeot 307 remorquée le dernier été après une panne moteur importante.
Le client était prêt à investir une somme conséquente pour sauver le véhicule, mais l’éventail prévu était serré. Il avait bien une enveloppe de 5 000 euros destinée à l’achat d’un nouveau véhicule, mais sur le marché actuel, « à 5 000 euros, on ne trouve pas grand-chose, car les prix des occasions restent très élevés » en raison d’une survalorisation générale. Finalement, le propriétaire a préféré consacrer 3 000 euros à la réparation plutôt que d’acheter une voiture d’occasion plus coûteuse.
Recherche de vieilles voitures
Les dernières données du Service des données et statistiques (Sdes) montrent que les Français conservent leurs voitures de plus en plus longtemps. En 2025, l’âge moyen du parc automobile français est d’environ 11,5 ans, contre 9 ans en moyenne en 2011.
« Il existe une vraie résistance à l’adoption des énergies nouvelles », analyse le vice-président de la FNA. « Cette résistance n’est pas idéologique, elle est liée au pouvoir d’achat et à l’incertitude autour des informations liées à la transition écologique et à la mobilité, ce qui rend la prise de décision plus complexe ».
Conséquence, « on observe une croissance annuelle comprise entre 15 et 20 % de la fréquentation des ateliers », estime Gérald Sgobbo.
Et même si les Français s’attachent de plus en plus à leurs vieux véhicules, les chiffres du marché de l’occasion montrent que ces derniers restent plébiscités lorsque vient le moment d’acquérir un autre véhicule.
« En cinq ans, la part des recherches pour des voitures affichant plus de 250 000 kilomètres au compteur a progressé d’environ 25 % sur l’ensemble des recherches. »
LeBonCoinà 42mag.fr
« La part des recherches qui leur est consacrée ne cesse d’augmenter année après année », ajoute même le site de petites annonces. Cette dynamique illustre, selon la plateforme, que les véhicules très kilométrés se hissent désormais dans le peloton de tête des modèles recherchés sur LeBonCoin Auto.
« Face à la hausse générale des prix, les acheteurs ne se privent plus de viser des modèles très kilométrés, perçus comme robustes et abordables », analyse LeBonCoin. Dans ce créneau, les modèles les plus demandés ne sont pas des reliques rongées par la rouille : ce sont surtout des modèles allemands comme les BMW Série 3 et 5, les Audi A3 et A4 ou la Volkswagen Golf qui occupent les premières positions. En revanche, certains modèles très kilométrés plus âgés séduisent davantage que leurs remplaçants. C’est le cas, par exemple, de la Peugeot 206, préférée à sa remplaçante la 207, ou encore de la 307, qui est choisie plus fréquemment que la 308.