Il s’agit d’un progrès majeur pour les droits des femmes et d’un face-à-face historique entre deux candidates à l’élection présidentielle de 2024. En l’espace de quelques jours, une transformation sans précédent s’est opérée au Mexique : l’avortement est désormais autorisé sur l’ensemble du territoire depuis le mercredi 6 septembre, en prévision de ce qui pourrait être l’éléction de leur première présidente.
Figure emblématique de deux mouvances politiques totalement différentes, Claudia Scheinbaum et Xotchitl Galvez sont deux femmes fortes du paysage mexicain. Scheinbaum, qui mène dans les sondages, est une collaboratrice de longue durée du président actuel de gauche. Elle a joué un rôle crucial, avec ce dernier, dans la bataille juridique qui a persuadé la Cour Suprême à légaliser l’avortement dans tout le pays le mercredi 6 septembre.
Ancienne dirigeante de Mexico, Claudia Scheinbaum, affiche fièrement son bilan sur la lutte contre la criminalité : « On prétendait que je ne pourrais rien faire à cause de mon genre, mais aujourd’hui je peux dire que nous avons réduit de 58% les crimes majeurs depuis mon élection à la mairie de Mexico ».
Mais sa rivale, Xotchitl Galvez, lui rappelle que Mexico n’est pas le Mexique dans son ensemble. « J’ai voyagé à Celaya, à Tijuana. Tous me parlent de violence. Je leur ai assuré que j’avais l’audace nécessaire pour confronter les criminels et maintenir l’ordre… » issue d’un courant politique machiste et conservateur, Xotchitl Galvez, candidate du Frente Amplio, une alliance des deux plus anciens partis de droite du Mexique, le PAN et le PRI, se présente avec une approche féministe consolidée.
La violence excessive cible régulièrement les figures politiques
Cette violence excessive est devenue courante et concentre sa rage de plus en plus sur le monde politique. Sur les cinq dernières années, plus de 120 politiciens ont été assassinés durant les campagnes présidentielles. Parallèlement, le nombre de femmes engagées sur le plan local ou fédéral a notablement augmenté.
Si la parité imposée par la réforme de 2014 n’est pas encore atteinte, on note tout de même que 42% des postes de gouverneurs d’État sont tenus par des femmes. Cette dynamique est aussi une réaction au contexte violent : Carmen Ortiz a repris la campagne électorale de feu son mari, abattu en pleine rue. Nous l’avions rencontrée en 2018 : « Les traites de la haine, du ressentiment et de la lâcheté ont pris la vie de mon mari ! »
Les femmes en deuil en première ligne pour trouver des solutions
Ces femmes mexicaines, souvent en deuil, sont les premières à chercher des solutions, car elles sont les premières victimes. Elles perdent leurs fils, leurs frères, leurs maris ou sont elles-mêmes malheureusement ciblées : chaque jour, dix femmes ont été tuées l’an dernier. Et dans 97% des cas, les meurtriers ne sont jamais retrouvés.
Depuis des années, des associations et des artistes dénoncent ces féminicides, à l’instar de la chanteuse mexicaine Vivir Quintana qui écrit : « Que l’État, les cieux, les rues tremblent/ Que les juges et les enquêteurs tremblent/ Les femmes ont perdu patience ».
Cette chanson est devenue un hymne féministe, écouté partout dans le monde, et c’est sous l’influence de ces mouvements que Claudia Scheinbaum et Xotchitl Galvez se sont lancées en politique.