Dans « Micro européen », un zoom sera effectué sur le Portugal, avec la participation de Ana Pedro, une journaliste qui est basée à Paris.
Antonio Costa, Premier ministre socialiste portugais, quitte son poste sur fond de corruption
Antonio Costa, l’homme qui a dirigé le Portugal depuis 2015, a soudainement laissé sa charge le 7 novembre. On a parlé de corruption, d’espionnage téléphonique, etc. Et pourtant, après sa démission, il apparaît que ces écoutes téléphoniques concernaient un autre personnage nommé Costa, un autre ministre.
franceinfo: Il semblerait donc que les écoutes n’étaient pas liées au Premier ministre, mais à un autre Costa…
Effectivement. C’est un choc total pour le Portugal. Le 7 novembre, une fouille a eu lieu dans le bureau du Premier ministre. Peu de temps après, ce dernier a déclaré: « Dans le contexte actuel, je n’ai d’autre choix que de démissionner. » Une nuée de confusion a alors envahi le pays. Une semaine plus tard, c’est un retournement de situation; la justice, qui affirmait avoir des preuves accablantes contre lui, a admis à tort que ce n’était pas lui le coupable, mais le monsieur Costa du ministère de l’Economie.
Un mal jugement évidemment grave
Il s’avère qu’un ministre, un conseiller du Premier ministre et son chef de cabinet étaient impliqués dans une affaire de corruption et de trafic d’influence. L’affaire est connue sous le nom de « l’affaire des influenceurs », car il s’agit d’une utilisation abusive du pouvoir pour obtenir des droits d’exploitation de mines de lithium, entre autres.
Le Portugal face à quelque chose de déjà scandaleux ?
En effet, c’est le cerne de cette investigation, ainsi que d’autres affaires liées à un centre de données, la production d’hydrogène vert, mais rien ne vise directement le Premier ministre. L’enquête le dira. Mais pour le moment, c’est la justice elle-même qui est critiquée. Soit par incompétence, bêtise ou carrément pire.
Quelle place Antonio Costa occupera à l’avenir, alors qu’il était considéré comme le prochain président de l’Union européenne ?
Charles Michel arborait le costume de président du Conseil européen, que Costa était censé porter ensuite. Aujourd’hui, son futur dépendrait de la justice portugaise. Il devra être totalement disculpé. Mais est-ce que le temps sera de son côté ? Antonio Costa était cette semaine en Allemagne. Il visitait une petite ville où le Parti socialiste portugais, dont il est membre, a pris son essor pendant la dictature. Les sociaux-démocrates allemands semblent toujours optimistes quant à son avenir européen.
Et pour ce qui est de son avenir au Portugal ?
Au Portugal, sa carrière semble terminée. Le président de la République avait la possibilité de nommer un nouveau Premier ministre ou de provoquer des élections anticipées. L’option de la nomination nouvel Premier ministre aurait pu être la plus plausible, car le gouvernement actuel a été élu en 2022 avec une majorité absolue.
Une optique politicienne ?
Néanmoins, le président a choisi de provoquer des élections anticipées. Le président, qui est de droite, a toujours éprouvé le désir de faire monter son parti. Les sondages au moment de la dissolution montraient un grand avantage en faveur de son parti, le PSD. Mais maintenant, il semble que le pays va entrer dans une imposante instabilité.
Le président ne semblerait pas exclure une alliance de droite avec l’extrême droite pour arriver au pouvoir. Donc, le pays est en train de s’engager dans une période d’instabilité.
Une situation difficile malgré un bon bilan économique
Paul Krugman, Prix Nobel d’Economie, vient de dire qu’Antonio Costa a coupé la politique d’austérité sévère en gardant un budget stable. Et grâce à ça, l’économie portugaise a pu reprendre son souffle.
En plus de cela, le Portugal a remboursé sa dette extérieure par anticipation. Donc Paul Krugman dit : « C’est un mystère absolu. »
Un portrait pas très flatteur du président sort par un ancien Premier ministre ?
Un curieux hasard, car le livre est sorti cette semaine, avec des mémoires de l’ancien Premier ministre, Francisco Pinto Balsemao. Il parle du président actuel en des termes très peu élogieux, citant ses coups de poignard dans le dos, et son besoin maladif de toujours être sous les projecteurs.