Les nouveautés à l’affiche cette semaine présentées par Thierry Fiorile et Matteu Maestracci : « Débâcle » un film de Veerle Baetens et « Eureka » une réalisation de Lisandro Alonso.
Si on devait décrire Débâcle, on pourrait utiliser le mot ‘rétribution’, si celui-ci n’avait pas perdu de son sens original avec son usage récurent dans le domaine du cinéma et si le long-métrage n’était pas constamment enclin à nous induire en erreur.
La protagoniste sur laquelle l’intrigue du film est centrée est Eva, qui semble être dans la trentaine. Eva est célibataire, introvertie, elle a coupé les ponts avec ses parents et peine à nouer des relations ‘normales’ avec son entourage.
Après nous avoir introduit Eva dans sa vie quotidienne, on la suit alors qu’elle se dirige vers son village natal, transportant un curieux et imposant bloc de glace dans sa voiture. Par le biais de flash-back astucieusement insérés, nous sommes transportés avec elle dans sa jeunesse, au cours d’un été durant lequel un événement grave et traumatisant s’est produit, n’offrant cependant qu’une fraction du mystère sous-jacent.
Eureka par Lisandro Alonso
Lisandro Alonso, 48 ans, qui a réalise six films en 22 ans, est un réalisateur qui explore les franges, les vastes espaces et, ici, possède une dimension chamanique ! Dans Eureka, il y a trois histoires, avec des époques, des lieux et des formes variés, mais ayant toutes un fil conducteur fragile : les premiers occupants des Amériques.
Nous commençons en noir et blanc avec un western sombre, où Viggo Mortensen est à la recherche de sa fille, alors qu’il rencontre une Chiara Mastroianni en aventurière audacieuse et des Amérindiens tout droit sortis de Hollywood. Puis le champ visuel s’élargit : le western était en fait un épisode de série télévisée. De nos jours, en plein hiver au Dakota, une policière amérindienne lutte contre le froid glacial et la précarité extrême de son peuple. Un vieil homme invoque les esprits des morts et débute la troisième partie, au Brésil, dans les années 70 : une tribu indigène où chaque jour, on se narre ses rêves pour y déchiffrer l’avenir.
Un homicide, une évasion, des prospecteurs d’or et encore les esprits, symbolisés par la métonymie d’un grand oiseau blanc qui relie les trois parties. Eureka est une expérience cinématographique qui incite au lâcher-prise pour suivre Lisandro Alonso, un réalisateur singulier. C’est un film conceptuel, mais finalement accessible, pourvu qu’on se laisse porter. Les images sont magnifiques, l’interaction avec la nature très intense et on prend le temps de méditer cette phrase prononcée par le vieil homme dans la deuxième partie : « Le temps n’est qu’une fiction créée par l’homme« .