Dans un premier long-métrage d’une grande maîtrise formelle, la cinéaste finlandaise-suédoise Johanna Pyykkö se penche sur les thèmes de la temporalité, de la tromperie et de la quête identitaire.
Le premier long-métrage signé par la réalisatrice finno-suédoise Johanna Pyykkö raconte une période clé dans la vie d’une jeune fille à Oslo. Dans cette tranche de vie, le spectateur aura bien du mal à distinguer la réalité de la fiction. Mon parfait inconnu sortira en salles le 24 juillet 2024.
Ebba, 18 ans, a quitté son quartier, sa mère et sa sœur atteinte de trisomie 21 pour s’installer dans un sous-sol confortable d’une charmante maison située dans un quartier aisé d’Oslo. Ebba travaille pour une société de nettoyage et s’occupe de sa sœur aussi souvent que possible. À distance, elle observe la jeunesse dorée du voisinage, se voyant parfois parmi eux.
Les propriétaires de son logement, partant en vacances pour un mois, lui laissent les clés de la maison. Quelques jours plus tard, en rentrant du travail, elle trouve au port d’Oslo un homme blessé à la tête, visiblement amnésique. Elle saisit cette opportunité et s’installe avec lui dans la maison de ses employeurs, lui faisant croire qu’il est son petit ami.
Johanna Pyykkö plante le décor de son intrigue dans une Oslo aux contrastes marqués : quartiers opulents et zones plus modestes, travailleurs nocturnes, immigrés impliqués dans des activités variées, résidents de belles maisons élégantes bordants le fjord.
Dans l’esprit d’Ebba
Rapidement, ce qui pourrait ressembler à une simple chronique sociale se mue en thriller psychologique. Le scénario nous plonge dans une tension constante, adoptant sans relâche le point de vue d’Ebba, une jeune fille qui ment continuellement et manipule un homme comme une simple marionnette.
Qu’est-ce qui est vrai, qu’est-ce qui est faux dans cette histoire de vie et de rencontres, et dans les événements qui se succèdent entre le départ et le retour des propriétaires? Ce que l’on voit est-il la réalité ou une illusion?

Original et visuellement réussi, ce premier long-métrage captivant est magnifiquement porté par la talentueuse Camilla Godø Krohn, dont la présence à l’écran est saisissante. Johanna Pyykkö utilise avec brio les décors, les accessoires, les costumes et les objets – comme ces petites figurines sans visage en terre cuite qui encadrent le film – pour égarer le spectateur dans les méandres d’un récit guidé par ce que l’on pourrait appeler un « narrateur non fiable » en littérature.
Avec un format 4:3, des gros plans sur le visage d’Ebba, des arrière-plans souvent flous, et un travail soigné sur le son, la mise en scène amplifie le trouble. Le spectateur se retrouve emprisonné dans la tête du personnage sans pour autant comprendre ce qui s’y passe réellement. Un puzzle divertissant où l’on s’amuse à démêler le vrai du faux.

Mon parfait inconnu explore la thématique du mensonge, le rapport entre la réalité et les rêves, et la tendance à fuir dans une fiction personnelle pour échapper à une réalité accablante.
Le film interroge également sur l’identité, et sur ce qui subsiste de nous lorsque nous vivons dans le mensonge ou lorsque notre mémoire nous fait défaut. Au cœur de tout cela se trouve la question de la possibilité d’une véritable rencontre amoureuse.

La fiche
Genre : Drame
Réalisateur : Johanna Pyykkö
Acteurs : Camilla Godø Krohn, Radoslav Vladimirov, Maya Amina Moustache Thuv
Pays : Norvège
Durée : 1h47
Sortie : 24 juillet 2024
Distributeur : Pyramide Distribution
Synopsis : Ebba, jeune femme solitaire de 18 ans, travaille dans le port d’Oslo. Un soir, elle découvre à terre un homme d’une grande beauté, blessé à la tête. Se rendant compte qu’il est atteint d’amnésie, elle lui fait croire qu’ils sont amants et leur construit un univers bâti sur le mensonge. Mais progressivement, Ebba comprend que les pires tromperies ne viennent peut-être pas d’elle…