Avec le décès de Michel Blanc, la troupe du Splendid perd l’un de ses membres fondamentaux parmi les sept qui composent ce groupe emblématique.
Avec leur humour déjanté et des répliques devenues légendaires, la troupe du Splendid, née dans les années 1970, a conquis le public grâce à des adaptations cinématographiques devenues emblématiques, notamment Les Bronzés et Le Père Noël est une ordure.
Composée de cinq hommes – Christian Clavier, Michel Blanc (qui nous a quittés dans la nuit du jeudi 3 au vendredi 4 octobre), Gérard Jugnot, Thierry Lhermitte, et Bruno Moynot – ainsi que de deux femmes – Josiane Balasko et Marie-Anne Chazel – leur groupe a laissé sa marque dans le cinéma français. Bien qu’ils aient tous poursuivi avec succès des carrières individuelles, ces sept amis sont restés très proches, se considérant même comme des « amis pour la vie », à l’image du titre des Bronzés 3.
Il est probable que le Splendid n’aurait jamais vu le jour sans un redoublement de Gérard Jugnot. Leur histoire commence sur les bancs du lycée Pasteur à Neuilly, en banlieue chic de Paris, en plein bouillonnement de Mai 68. Dès la classe de cinquième, Jugnot, fils de plombier, et Clavier, fils de médecin, se lient avec Thierry Lhermitte et Michel Blanc, tous fous de cinéma.
Ils conçoivent leurs premières œuvres scéniques, marquées par une créativité sans bornes. Étant à l’époque scolarisée chez les filles, Marie-Anne Chazel rejoint rapidement la troupe et formera bientôt un couple avec Christian Clavier. Après l’obtention de leur baccalauréat, ils s’inscrivent aux cours de l’actrice Tsilla Chelton — qui deviendra la célèbre « Tatie Danielle » — et en 1974, réaménagent une ancienne pizzeria à Montparnasse pour y créer un espace de café-théâtre, inspirés par le modèle du Café de la Gare. « Notre première pièce portait le titre de Ma tête est malade, et seulement trois personnes étaient présentes dans la salle ! », se remémore Marie-Anne Chazel.
L’avènement après des débuts modestes
Initialement appelée « La Compagnie de la turlutte », la troupe adopte le nom « Splendid » en 1976 lorsqu’elle s’installe rue des Lombards, dans une ancienne mûrisserie de bananes. L’arrivée de Josiane Balasko, remplaçant Valérie Mairesse, et de Bruno Moynot complète alors la troupe.
« Nous souhaitions avoir un café-théâtre à nous, éviter les auditions et ne pas dépendre d’un directeur qui pourrait nous renvoyer, écrire en toute liberté. Nous formions une force qui avançait ensemble », expliquait Josiane Balasko en juillet 2021 au Parisien. Après des périodes difficiles, la reconnaissance arrive avec Amours, coquillages et crustacés (1977), inspirée par leurs souvenirs au Club Med, et adaptée un an plus tard au cinéma avec le film Les Bronzés. Ce dernier attire 2,3 millions de spectateurs…
Michel Blanc, un désir d’échapper à l’ombre du Splendid
Les Bronzés font du ski, sortie l’année suivante, rencontre initialement moins de succès — bien que le film devienne culte avec le temps. Néanmoins, le Splendid parvient à s’imposer sur grand écran et poursuit sur cette lancée avec Le Père Noël est une ordure (1982), nouvelle adaptation de leur pièce créée après s’être finalement installés près des Grands boulevards, dans le Xe arrondissement parisien.
Des répliques immortelles comme « Zézette épouse X », le fameux « doubitchou roulé sous les aisselles », ou le célèbre gilet-serpillière sont devenues des icônes. « C’était un film novateur et subversif, mais combien de nominations aux César ? Aucune », déplorait Christian Clavier.
Le groupe se dissout progressivement en tant que « kolkhoze collectif », selon les termes de Gérard Jugnot. Écrire à plusieurs devient de plus en plus compliqué. Michel Blanc est le premier à s’éloigner : « Ce n’était pas dirigé contre mes amis. Je me questionnais simplement sur ma propre existence, me demandant ‘suis-je 1/7e du Splendid ou bien un individu à part entière’ ?' ».
« Nous avions dès le départ convenu que nous avancerions ensemble tout en ayant chacun notre propre trajectoire professionnelle », expliquait Bruno Moynot, qui resta le dernier à s’occuper de l’administration du théâtre du Splendid. Jusqu’à la réunion mémorable pour Les Bronzés 3 en 2006, certains membres se retrouvent sporadiquement à deux, trois, ou quatre sur différents plateaux de cinéma et théâtres.
« Un lien indéfectible depuis un demi-siècle »
Avec les « pièces rapportées », certaines relations se sont détériorées. Par exemple, Anémone et Dominique Lavanant, l’esthéticienne Christiane, qui s’est distanciée après les Bronzés 3, qu’elle qualifie de son « pire souvenir de tournage. » « Il n’y avait plus d’affectif du tout, plus rien ».
En revanche, les membres historiques de la troupe sont demeurés unis. En 2021, ils se retrouvent une fois encore tous ensemble pour recevoir leur César d’honneur, célébrant ainsi l’incroyable épopée du Splendid. Comme un honneur pour leur longévité professionnelle ! « Nous sommes liés depuis cinquante ans », déclarait avec émotion Gérard Jugnot sur scène à cette occasion.