Au micro de France Bleu Nord, lors du premier jour du procès impliquant 19 personnes accusées d’avoir hébergé des mineurs sans autorisation, Jean-René Lecerf a déclaré qu’il avait « découvert les faits, non par l’intermédiaire de mes équipes, mais par le biais de la gendarmerie et des instances judiciaires ».
Jean-René Lecerf, ancien président du conseil départemental du Nord, invité sur France Bleu Nord, a exprimé sa consternation face à une situation passée sous silence pendant des années. Il faisait référence au procès qui s’ouvre à Châteauroux le 14 octobre, où 19 individus sont accusés d’avoir hébergé illégalement des mineurs, certains ayant subi des traitements inhumains. Ces enfants avaient été placés sans autorisation par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) du Nord dans l’organisme « Enfance et Bien-Être » entre 2010 et 2017. Cet organisme se trouvait dans l’Indre et ne possédait pas les autorisations nécessaires. Jean-René Lecerf, bien qu’ayant pris ses fonctions en 2015, déclare n’avoir été informé de cette affaire qu’en 2018. « C’était un secret gardé sous silence », a-t-il expliqué.
« Des personnes de confiance ont peut-être été impliquées »
Selon Lecerf, ses prédécesseurs à la présidence du département ignoraient également cette affaire. Il mentionne avoir des relations amicales avec Bernard Derosier, Patrick Kanner et Didier Manier, qui ont dirigé durant ces années problématiques. « J’ai été informé par la gendarmerie et les autorités judiciaires, pas par mes propres services, » a-t-il confié. Dès qu’il a appris la situation, Lecerf a mis fin aux pratiques illégales et a entamé une réorganisation complète des services de l’Aide sociale à l’enfance.
Pendant sept ans, il n’y a « absolument » pas eu de communication concernant ce scandale. Les vice-présidents en charge de l’aide sociale n’étaient pas non plus informés, selon lui. « J’ai le sentiment qu’un petit groupe au sein des services a gardé le silence, car l’affaire était ancienne, » souligne-t-il. Il note que des personnes de confiance, responsables des tarifs appliqués, étaient probablement au courant, puisque la structure non agréée recevait des paiements.
« Il est évident que les avertissements n’ont pas reçu l’attention nécessaire de la part des autorités, même à haut niveau, » affirme Jean-René Lecerf.
Jean-René Lecerfà France Bleu Nord
Lecerf regrette les circonstances. « Mon rôle impliquait de diriger une administration de 10 000 personnes et de veiller sur 20 000 enfants dans la protection de l’enfance. À l’époque, je me concentrais davantage sur la gestion de l’afflux d’enfants étrangers non accompagnés et sur l’avenir plutôt que de regarder en arrière, » a-t-il ajouté.
La responsabilité du département
Les employés directement impliqués n’ont pas tous été sanctionnés. « Je n’ai pas cherché à blâmer les employés affectés à la tarification, » explique Lecerf. Cependant, les dirigeants de l’Aide sociale à l’enfance ont été transférés à d’autres postes. Abordant le manque d’agrément de la structure, il précise qu’il ne s’agit pas d’excuser mais de comprendre : « La responsabilité des services sociaux est immense et complexe. Parfois, une solution doit être trouvée rapidement pour des enfants difficiles à placer dans des environnements peu sûrs. » Selon lui, bien que l’intention fût de croire en un bon accueil, des erreurs significatives ont été commises.
Le département a versé plus de 600 000 euros aux familles non agréées, mais il ne sera pas partie civile dans l’affaire en cours. « Il serait difficilement justifiable pour le département, qui a commis des erreurs, de réclamer quoi que ce soit, » conclut-il. Lecerf s’inquiète pour le futur de l’ASE : « Je reste prudemment optimiste. Les réductions budgétaires de l’État impactent aussi les budgets des départements. Ils peinent déjà à gérer les questions liées à la vieillesse et au handicap. Il est crucial d’assurer la sécurité des financements de l’ASE, » alerte-t-il. Si ce n’est pas possible, « la compétence pourrait être renvoyée au niveau national, » estime Jean-René Lecerf.