Thierry Fiorile et Matteu Maestracci présentent les nouveaux films à l’affiche cette semaine : il y a notamment « Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde », une création d’Emanuel Pârvu, un cinéaste et comédien originaire de Roumanie, ainsi que « Fario », réalisé par Lucie Prost.
Dans le delta du Danube, un soir estival, un jeune de 17 ans nommé Adi est brutalement pris pour cible : ses parents, modestes villageois, imaginent d’abord que c’est un vol ayant tourné au drame. Cependant, l’enquête révèle rapidement que l’auteur présumé, qui est le fils d’un influent personnage local, aurait agressé Adi après l’avoir aperçu en train de courtiser un autre garçon.
Dans cette petite communauté où l’emprise de l’Église est significative, révéler la vérité est inenvisageable. Tous les moyens sont mobilisés pour garder cette affaire sous silence : menaces, suppression des dettes des parents d’Adi en échange du retrait de la plainte, et même une tentative rocambolesque d’exorcisme par le prêtre du village. Nous sommes dans le monde des chrétiens orthodoxes.
Bien que le film ait une démarche assez pédagogique, c’est son approche qui le rend captivant : des plans fixes prolongés et méticuleux au sein d’une nature indomptée, une douceur apparente dans un univers imprégné de violence, puisqu’incapable de tolérer la diversité. Le réalisateur, Emanuel Pârvu, critique ouvertement cet archaïsme encore présent en Roumanie.
Moins célèbre que certains de ses prédécesseurs ayant l’habitude des grands festivals comme Cristian Mungiu ou Cristi Puiu, Emanuel Pârvu s’affirme néanmoins dans la lignée de ce cinéma roumain exigeant, qui dépeint par des récits originaux, l’évolution contemporaine d’une nation toujours en transition. C’est fort bien réussi.
Fario de Lucie Prost
Fario désigne une variété de truite vivant notamment dans la Loue, un cours d’eau du Doubs, région de l’est de la France, où le film nous conduit tout en ramenant Léo sur les lieux. Léo, ingénieur brillamment promu et fêtard vivant à Berlin, retourne chez lui suite au suicide de son père agriculteur. Il prévoit de vendre leurs terres à une société d’exploitation de métaux rares, une vente à laquelle son cousin s’oppose farouchement… Dans ce contexte, Léo découvre un potentiel scandale écologique en cherchant à donner un sens à sa vie.
Cette empreinte est à la fois la force et l’inconvénient de Fario, qui ambitionne sans doute d’aborder trop de thématiques simultanément, avec les imprécisions inévitables d’un premier long-métrage. Cependant, l’œuvre se singularise, bien ancrée dans notre époque et ses enjeux, et le portrait de la jeunesse y est également réussi. Lucie Prost a su s’entourer de jeunes acteurs talentueux comme Finnegan Oldfield, Megan Northam, Andranic Manet et Camille Rutherford.