Un automobiliste qui a renversé un cycliste à la suite d’une altercation dans le centre de Paris a été inculpé de meurtre dans une affaire qui a choqué la France. Plusieurs rassemblements doivent avoir lieu samedi en hommage à la victime de 27 ans qui était membre d’une association citoyenne de cyclisme.
Le conducteur du SUV, âgé de 52 ans, identifié comme Ariel M., est accusé d’avoir délibérément ciblé le cycliste, nommé Paul Varry, 27 ans.
L’incident de mardi dans le 8ème arrondissement de Paris survient alors que les tensions montent dans la bataille pour l’espace public dans la capitale encombrée.
Les échanges tendus entre cyclistes et automobilistes sont monnaie courante dans le centre-ville.
Le conducteur, dont la fille adolescente se trouvait également à bord de la voiture, a été interpellé sur place.
Mardi, l’automobiliste et le cycliste ont été vus en train de se disputer au bord de la route.
Altercation
Selon sept témoignages, Ariel M., essayant de progresser sur la route encombrée, a conduit sa voiture sur la piste cyclable adjacente sur environ 200 mètres, où il a écrasé le pied du cycliste, ont indiqué les procureurs.
Varry, le cycliste, a frappé du poing sur le capot de la voiture pour alerter le conducteur, qui a d’abord reculé.
Varry s’est ensuite placé devant la voiture pour exprimer sa colère contre le conducteur, qui a commencé à se diriger vers lui, selon les déclarations de témoins.
Une autopsie a confirmé que les blessures mortelles de Varry avaient été causées par la voiture. Le test d’alcoolémie et de drogue du conducteur s’est révélé négatif.
Des images de vidéosurveillance ont montré le véhicule s’élevant une fois lorsque le pneu avant gauche a roulé sur la carrosserie, puis à nouveau lorsque le pneu arrière est tombé.
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L’avocat de l’homme, Franck Cohen, a déclaré à l’AFP que son client « n’a aucune explication sur ce qui s’est passé ».
Il a ajouté que le conducteur « a tenté de s’extraire » d’une situation de « stress et de peur » et qu’il aurait pu perdre le contrôle de son véhicule ce faisant.
Ariel M., directeur commercial dans le secteur technologique et père de quatre enfants, « pensait depuis beaucoup plus au jeune homme, qui a le même âge que son fils, qu’à lui-même », a déclaré Cohen.
Un juge a décidé vendredi que le conducteur, qui vit dans le département des Hauts-de-Seine, à l’ouest de la capitale, serait maintenu en détention jusqu’à son procès.
L’accusé lui-même a déclaré lors de l’audience, au cours de laquelle il a fondu en larmes à plusieurs reprises : « Je suis désolé pour ce qui s’est passé. Je n’ai jamais eu l’intention de l’écraser. Je n’ai jamais été un voyou, je n’ai jamais fréquenté des voyous. »
« Tragédie inacceptable »
Les associations françaises de promotion du cyclisme ont condamné cet incident, « Paris en Selle » le qualifiant de « tragédie inacceptable ».
Varry était un « membre actif » du groupe, selon sa présidente Anne Monarché, qui a décrit le jeune homme comme quelqu’un qui « se battait pour une ville apaisée, pour qu’on puisse faire du vélo en toute sécurité ».
Quelque 200 personnes se sont rassemblées mercredi devant l’église de la Madeleine pour rendre hommage à Varry, avec plusieurs manifestations de cyclistes prévues samedi.
Paris en Selle a appelé à un hommage place de la République à Paris samedi à 17h45 ainsi qu’à une minute de silence dans tout le pays.
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La mairie de Saint-Ouen, la banlieue nord de la France où il vivait, a déclaré qu’il avait fait de la cause des cyclistes urbains « l’engagement de sa vie » et qu’il avait aidé les autorités à promouvoir le vélo dans la ville.
La maire de Paris, Anne Hidalgo, a déclaré qu' »il est inacceptable de mourir à notre époque en faisant du vélo à Paris, à 27 ans ».
La prochaine séance du Conseil municipal de Paris du 19 novembre s’ouvrira par une minute de silence pour Varry.
Hidalgo, qui dirige la mairie depuis plus d’une décennie, est à l’origine d’une initiative ambitieuse visant à faire de Paris une ville favorable au vélo, avec pour objectif de la rendre « 100 % cyclable » d’ici 2026.
Ressentiment
Paris est déjà classée parmi la douzaine de villes au monde les plus favorables au vélo depuis qu’elle dispose de centaines de kilomètres de pistes cyclables désignées.
Les cyclistes peuvent également griller certains feux rouges tant qu’il n’y a pas de piétons et peuvent emprunter des rues à sens unique dans la direction opposée aux voitures.
Une grande partie de la rue de Rivoli, l’une des principales artères du cœur de Paris, est désormais réservée aux vélos. La mairie a promis de rendre prochainement l’emblématique place de la Concorde aux vélos et aux piétons.
Mais le nouvel espace accordé aux vélos est souvent issu de routes auparavant entièrement utilisées par les automobilistes, dont beaucoup sont mécontents du changement.
L’année dernière, 226 cyclistes sont morts sur les routes françaises.