Lorsque Marseille, troisième, accueillera le Paris Saint-Germain, leader de la Ligue 1, au Vélodrome dimanche soir, ce devrait être le football qui occupe le devant de la scène. Les fans inconditionnels des deux côtés ont cependant réussi à faire en sorte que l’homophobie et la brutalité enlèvent l’éclat de ce qui sera un concours intrigant.
Marseille, sous Roberto De Zerbi, a fait preuve de plus en plus de ruse et de bon sens au cours des huit premiers matchs pour être considéré comme un challenger plausible au titre d’une équipe du PSG toujours en train de reconfigurer son identité sans le meilleur buteur Kylian Mbappé.
Les incidents hors du terrain ont également fait la une des journaux. Avant la victoire 5-0 à Montpellier le 20 octobre, les supporters marseillais ont été impliqués dans des affrontements avec la police qui ont fait six blessés.
La veille, lors de la victoire 4-2 contre Strasbourg au Parc des Princes, des supporters du PSG avaient pris pour cible Marseille et son milieu de terrain récemment recruté Adrien Rabiot pour des insultes homophobes.
Pourquoi? Une rivalité vieille de plusieurs décennies entre clubs ambitieux et aussi une fiction de trahison : après sept ans au PSG puis cinq saisons à la Juventus en Italie, Rabiot devrait vouloir exercer son métier à Marseille.
Oui. Oui. Oui. Une telle inconstance appelle des invectives.
Venin
Les chants homophobes jaillissent de la tribune du PSG à Auteuil malgré les appels répétés dans la sonorisation pour stopper la virulence.
Le ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a condamné ce comportement.
« Ils devraient être sévèrement punis », a-t-il déclaré à propos de deux meneurs présumés qui ont été identifiés et qui risquent d’être poursuivis en justice.
« C’est devenu insupportable. On ne peut plus supporter les chants homophobes. Je ne le supporterai plus », a ajouté Retailleau.
Mais oh, quel monde. Quel monde. 2024, armageddon climatique qui frappe à la porte, myriades d’atrocités au Moyen-Orient et bigoterie performative du samedi soir dans l’ouest parisien.
« Le PSG réaffirme son ferme engagement contre toute forme de discrimination, y compris l’homophobie », a indiqué le club dans un communiqué jeudi.
« Le PSG prend toutes les mesures nécessaires, avant et pendant les matches, pour que le Parc des Princes reste un lieu inclusif pour tous. »
Tolérance zéro
La Ligue de Football Professionnel (LFP), qui chapeaute les deux premières divisions françaises, a ajouté à l’issue d’une réunion des ministres du gouvernement et des responsables du football : « Tout le monde autour de la table a réaffirmé la tolérance zéro dans la lutte contre les discriminations dans les stades, y compris les chants homophobes.
« La LFP soutient l’identification et l’interpellation des fauteurs de troubles pour imposer des sanctions individuelles. »
Au moins, les autorités semblent unies pour prendre une certaine forme d’action.
Il y a seulement cinq ans, les plus hautes sphères de la Fédération française de football (FFF) semblaient vouloir claironner leur indifférence.
Noël Le Graët, alors président, a déclaré que la FFF ne demanderait pas aux arbitres d’arrêter les matches, sauf dans les cas où un stade entier se rendrait coupable de chants homophobes.
« Je pense que nous arrêtons trop de matches », a-t-il déclaré. « Cela fait plaisir à certains ministres du gouvernement, mais cela me dérange », a déclaré Le Graët au journal régional. Ouest-France.
Arrêt
« Nous arrêterons les matches s’il y a des insultes homophobes constantes sur tout le terrain, mais si 2 000 imbéciles dans une foule de 30 000 scandent, je ne vois pas pourquoi les 28 000 autres devraient être punis », avait alors déclaré Le Graët.
Le Graët est tombé dans l’obsolescence, victime de ses propres attitudes antidiluviennes et de ses commentaires dédaigneux à l’égard de la légende du football français Zinedine Zidane.
Mais la réponse des derniers jours aux chants semble mal coordonnée.
Le nouveau ministre des Sports, Gil Avérous, a déclaré qu’il souhaitait que les clubs ayant un passé de violence tels que le PSG, Marseille et Lyon veillent à ce que les noms individuels figurent sur les billets afin que les détenteurs puissent être suivis.
Il a également exhorté les autorités du football à appliquer des règles autorisant l’interruption ou l’abandon de matches en raison d’abus homophobes.
« Cela a été très bien compris par la LFP », a déclaré Avérous après avoir rencontré les patrons du football.
Mais Retailleau a adopté une approche plus prudente. « Arrêter les matches, c’est très compliqué. Ce n’est pas la bonne solution », a-t-il déclaré.
Il préfère recourir à des policiers infiltrés parmi les fidèles pour identifier et extraire les mécréants.
Omission
Deux jours avant le choc entre Marseille et le PSG, des groupes sportifs gays et lesbiens accusaient le gouvernement de les isoler de la recherche de solutions durables.
« La réunion d’urgence de Bruno Retailleau nous a laissés perplexes », indique un communiqué commun de l’Inter-LGBT, LGBT+ et du Paris FC Arc-en-Ciel.
« La méthode est incompréhensible, car aucune association de sports de terrain LGBTQI+ n’a été invitée. Le message semble donc clair : la lutte contre la LGBTIphobie dans les stades de sport et de football se poursuivra sans nous. »
Les ministres ont rétorqué que les groupes Carton Rouge et SOS Homophobie avaient été inclus dans les discussions au ministère de l’Intérieur.
Mais le test clé sera la manière dont les autorités du football français réagiront après la confrontation de dimanche.
Ce match sera bien plus que la neuvième rencontre de la saison 2024/25 de Ligue 1.
Le Classique, comme s’appellent les rencontres entre Marseille et le PSG, pourrait offrir aux autorités françaises leur moment de vérité.
Ils peuvent prouver que les haineux et les homophobes n’ont pas le contrôle.







