Marine Le Pen, ainsi que d’autres membres éminents du Rassemblement national, soutiennent que la procureure chargée du procès concernant les anciens assistants parlementaires du parti connu auparavant sous le nom de Front National a dévoilé ses véritables intentions en déclarant qu’elle serait profondément affectée par une demande d’acquittement.
Le Rassemblement National s’indigne contre un procès qu’il juge politisé
Toutes les personnalités du Rassemblement National ont vivement critiqué ce qu’elles considèrent comme un procès à caractère politique, à la suite des recommandations faites par le parquet de Paris concernant l’affaire des assistants parlementaires européens de l’ancien Front National, le mercredi 13 novembre. Le parquet a notamment sollicité une sentence de cinq ans de prison, dont deux ans ferme avec possibilité d’aménagement, ainsi que cinq ans d’inéligibilité pour Marine Le Pen. Si le tribunal décide de suivre cette demande, Marine Le Pen se retrouverait dans l’incapacité de candidater à l’élection présidentielle de 2027.
💬 « Le parquet est extrêmement outrancier »
Marine Le Pen s’exprime à propos des 5 ans d’inéligibilité requis contre elle dans le procès RN pic.twitter.com/8qk36j7QJP
— BFMTV (@BFMTV) November 13, 2024
Marine Le Pen conteste les demandes du parquet
Marine Le Pen a dénoncé devant les médias l’outrance des réquisitions du parquet. Elle a déclaré : « Il y a eu au moins un événement qui aurait pu nous faire sourire si les faits n’étaient pas aussi graves et les enjeux aussi importants. C’est l’aveu de Madame la procureure quand elle a dit : écoutez sur ce contrat, je n’ai aucun élément, mais je ne peux pas demander la relaxe parce que ça me ferait trop mal. » Cette déclaration, « ça me ferait trop mal », est massivement relayée sur les réseaux sociaux et reprise par de nombreux élus du RN tels que les députés Jean-Philippe Tanguy, Sébastien Chenu, Mathieu Valet, et Thomas Ménagé.
Une citation qui fait polémique
Il convient de souligner que cette phrase a effectivement été prononcée par la procureure de la République, Louise Neyton, au cours de son long réquisitoire de neuf heures. Au moins sept journalistes, représentants de 42mag.fr, BFMTV, le Parisien et le Figaro, ont confirmé avoir entendu cette phrase. Les membres du Rassemblement National estiment qu’il s’agit d’une manifestation d’opinion politique, suggérant que la procureure a laissé apparaître ses préjugés, leitmotiv d’un réquisitoire qu’ils jugent biaisé politiquement. La phrase, sortie de son contexte, peut ainsi être interprétée de cette manière, bien que replacée dans son contexte initial, elle pourrait tout aussi bien refléter un commentaire basé sur les faits présentés.
Un point particulier du dossier
Stéphane Durand-Souffland, chroniqueur judiciaire pour le Figaro, a précisé que la procureure évoquait ce point dans le cadre d’un dossier plus large concernant les accusations de recel de détournements de fonds publics imputées à Jean-François Jalkh, alors assistant parlementaire de Jean-Marie Le Pen. Ces deux derniers ne sont pas jugés actuellement pour raisons de santé. Louise Neyton a exprimé sa certitude quant à l’existence de ce recel de fonds, faisant partie d’un « système organisé » visant à détourner des fonds du Parlement européen au profit de l’ex-Front National, bien qu’elle n’ait pas en sa possession la preuve indiscutable de ce point précis. Selon elle, demander la relaxe aurait contredit sa conviction personnelle.
Vincent Vantighem de BFMTV, qui a retranscrit les réquisitions sur X, a rapporté cette citation : « Je ne peux pas demander une relaxe [partielle]. Ça me ferait trop mal. Je m’en rapporte donc [à la décision du tribunal]. »
#RN : Elle a reconnu qu’elle n’avait pas grand-chose pour déterminer l’illégalité de ce contrat et a eu cette formule. « Je ne peux pas demander une relaxe [partielle]. Ca me ferait trop mal. Je m’en rapporte donc [à la décision du tribunal]… »
Imaginez la réaction de la défense
— Vincent Vantighem (@vvantighem) November 13, 2024
Les magistrats ont le droit de s’exprimer librement, mais avec des limites
Pour mettre en perspective ces déclarations, il est essentiel de savoir que l’expression libre est un droit conféré aux magistrats. Comme l’explique Ludovic Friat, président de l’Union syndicale des magistrats, « La parole à l’audience, dans le cadre du débat judiciaire, est libre » qu’il s’agisse du parquet, de la défense ou des parties civiles.
Le Conseil supérieur de la magistrature a confirmé cette liberté d’expression dans un avis remis au ministère de la Justice en mai 2023, durant le mandat d’Éric Dupond-Moretti comme Garde des Sceaux. « La garantie de la liberté d’expression des magistrats est assurée aussi bien par le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État que par la Cour européenne des droits de l’homme », affirme le CSM.
Cependant, cette liberté n’est pas sans cadre. La loi organique relative au statut de la magistrature, datant de 1958, stipule, dans son article 10, que « toute manifestation d’hostilité au principe ou à la forme du gouvernement de la République est interdite aux magistrats, de même que toute démonstration de nature politique incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions. L’expression publique des magistrats ne saurait nuire à l’exercice impartial de leurs fonctions ni porter atteinte à l’indépendance de la justice ».
En outre, l’article 43 énonce que « Tout manquement par un magistrat à l’indépendance, à l’impartialité, à l’intégrité, à la probité, à la loyauté, à la conscience professionnelle, à l’honneur, à la dignité, à la délicatesse, à la réserve et à la discrétion ou aux devoirs de son état constitue une faute disciplinaire ».