Mardi, Emmanuel Macron a informé les dirigeants des partis politiques, rassemblés à l’Élysée sans inclure le Rassemblement national (RN) et la France insoumise (LFI), de sa volonté de désigner un nouveau Premier ministre sous deux jours. Pendant ce temps, le RN s’insurge contre la possibilité d’une large coalition.
Dans l’attente de désigner un nouveau chef de gouvernement, Emmanuel Macron a convoqué, mardi 10 décembre, à l’Élysée, les représentants des partis de droite, de gauche et du centre. Le consensus est clair : il faut empêcher Marine Le Pen d’accéder au pouvoir. Cette stratégie est à la fois potentiellement réussie et périlleuse. L’urgence principale, pour sortir de l’impasse politique actuelle et retrouver un semblant de stabilité, est de faire en sorte que le futur gouvernement ne soit pas sous l’influence de la dirigeante de l’extrême droite. Michel Barnier en a déjà subi les conséquences. De plus, le palais présidentiel refuse catégoriquement d’abandonner les rênes du pouvoir au Rassemblement National. Il est donc impératif que les partis appartenant à ce que l’on appelle « l’arc républicain » unissent leurs forces pour éviter de voter de nouvelles motions de censure. Le danger réside dans le fait que cet accord pourrait renforcer Marine Le Pen en tant qu’unique choix alternatif. Elle a déjà saisi cette opportunité pour se déclarer comme la « seule opposition ». Le Rassemblement National critique vigoureusement la menace d’une supposée « grande coalition ».
Il semble peu probable qu’un gouvernement soit constitué de ministres de divers horizons politiques tels que la droite, les socialistes, les macronistes et les communistes. Chacun des camps rejette cette idée. Cependant, Marine Le Pen voit un avantage à maintenir cette illusion. Jordan Bardella critique déjà ce qu’il nomme le « parti unique ». Cela n’évoque-t-il rien de familier ? Souvenons-nous du concept de « l’UM-PS » agité par Jean-Marie Le Pen au début des années 2000. Pour ceux qui se remémorent les faits plus anciens, la notion de la « bande des 4 » (PS-PC-RPR-UDF) vilipendée par le même Le Pen dans les années 80. Ou encore, les attaques contre les partis qualifiés de « Ripoublique » ou de « République des pourris » par l’extrême droite depuis les années 30. On constate ici le retour en arrière stratégique majeur de Marine Le Pen.
Modification tactique du Rassemblement National
Après les réquisitions lors de son procès pour détournement de fonds publics, Marine Le Pen a repris une rhétorique fortement « anti-système ». Elle a abandonné sa stratégie de respectabilité au Parlement. Cette rechute l’a poussée à collaborer avec les insoumis pour tenter de renverser le gouvernement Barnier. Le Pen a déclenché une crise politique, au risque d’irriter certains électeurs de droite. Parmi eux, des agriculteurs qui s’en prennent aux bureaux des députés, y compris ceux du RN, ayant soutenu la censure. Ou ces électeurs manquants qui ont contribué à la défaite inattendue du candidat soutenu par Le Pen lors d’une élection législative dans les Ardennes.
Si ses opposants parviennent à établir un « accord de non-censure », le RN perdrait son levier d’influence et sa capacité de nuisance. Il redeviendrait marginal sur la scène politique. En effet, le RN fonctionne à l’inverse des piles Wonder de notre enfance : il s’use uniquement lorsqu’il n’est pas sollicité.