Avec la perspective imminente de voir s’installer un nouveau Premier ministre, un point d’interrogation demeure : jusqu’où s’étendront les libertés d’action du futur résident de Matignon ? Compte tenu de la répartition actuelle des pouvoirs à l’Assemblée, il est probable qu’il s’attachera principalement à avancer sur des projets de loi qui bénéficient d’un large accord.
Nous devrions assister, probablement en fin de journée ce jeudi 12 décembre, à la désignation d’un nouveau Premier ministre. En attendant de découvrir qui aura cette responsabilité à Matignon, tous les regards sont tournés vers cette annonce imminente. Mais au-delà de cette nomination, une autre question se pose : comment le nouveau gouvernement fonctionnera-t-il ? Après la possibilité d’un accord de non-censure discuté parmi les partis de « l’arc républicain », réunis mardi à l’Élysée autour d’Emmanuel Macron, interrogeons-nous sur les objectifs de cette nouvelle équipe.
Il est crucial de former un nouveau gouvernement, mais pour quoi faire exactement ? À l’Élysée, il est regretté que Michel Barnier n’ait pas pris le temps de rassembler ses partisans en vue d’élaborer une vision commune avant de s’engager dans la discussion budgétaire. Cela a conduit Gabriel Attal et Laurent Wauquiez à entraver ses efforts systématiquement. Le prochain en ligne devra surmonter ces défis. Sa tâche consistera à regrouper ceux prêts à lui accorder leur confiance, afin de dialoguer avec eux sur la création d’une plateforme programmatique minimale.
Éviter les conflits
Cela ne sera pas une mince affaire. Le futur responsable de Matignon devra composer avec les exigences de chacun pour maintenir leur soutien. Il se confrontera ainsi aux « lignes rouges » établies par les différents groupes, eux-mêmes obligés de faire des compromis. Par exemple, pour rassurer les partisans de Macron qui insistent sur la réforme des retraites, des pistes de discussions commencent à se dessiner. La gauche pourrait accepter de repousser leur demande d’annulation immédiate de l’augmentation de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, à condition qu’une conférence sociale soit convoquée pour redonner une place prépondérante aux syndicats, comme l’a proposé le leader du PCF, Fabien Roussel. Mais que décider de la loi sur l’immigration proposée par Bruno Retailleau ? Le prochain Premier ministre pourrait-il l’ignorer pour apaiser la gauche sans s’aliéner la droite ? Idem pour la question de la réduction des dépenses publiques, la fiscalité, notamment le retour de l’ISF, ou encore la mise en place d’un système proportionnel, autant de sujets qui divisent ceux susceptibles de soutenir le futur gouvernement.
Face à ces obstacles, le futur Premier ministre pourrait choisir de se concentrer sur des textes plus fédérateurs, comme la loi d’orientation agricole, et de remettre à plus tard, possiblement jusqu’en 2027, tous les sujets épineux. Voilà un autre danger latent qui inquiète Emmanuel Macron : l’immobilisme. Alors que la dette atteint des sommets, les déficits se creusent, et le chômage connait une recrudescence, la France peut-elle se permettre de rester inerte ? Pour débloquer cette situation politique, il est impératif de créer un gouvernement stable, certes, mais aussi résilient, durable… mais pour quels objectifs ?