L’ex-chef du gouvernement conseille à Emmanuel Macron d’adopter une attitude plus réservée, tandis qu’il encourage François Bayrou à porter plus d’attention au Parlement.
« Je crois qu’il est essentiel que les écologistes, les socialistes et les communistes restent dans le camp de l’opposition », déclare Lionel Jospin, ancien Premier ministre socialiste (1997-2002), lors de son passage sur France Inter le lundi 16 décembre. « Cependant, il est aussi primordial qu’ils soutiennent la longévité de ce gouvernement, même s’ils ne souscrivent pas à ses politiques », poursuit-il, quelques jours après que François Bayrou ait été choisi pour diriger Matignon. Pour le Parti socialiste, « entrer dans un gouvernement de coalition, une possibilité qui est actuellement écartée, entraînerait une grande ambivalence politique », met-il en garde.
« Il est urgent de constituer un gouvernement et je garde espoir que François Bayrou s’en occupera promptement », souligne Lionel Jospin, en ajoutant que la nouvelle équipe ministérielle doit être « respectée. » Selon Lionel Jospin, il est crucial que « François Bayrou élargisse ses perspectives » en suivant la requête du Parti socialiste qui pousse à un « réajustement de la stratégie gouvernementale. » Le nouveau chef du gouvernement doit adresser des gestes « en faveur d’une opposition qui serait disposée à soutenir une relative stabilité institutionnelle », prévient-il. Car pour les socialistes, communistes et écologistes, il n’est pas question de « paralyser le fonctionnement normal des institutions publiques. Ils posent avec raison que le nouveau Premier ministre doit considérer les espoirs, les aspirations ou les revendications exprimées par les citoyens, et qui étaient présents dans notre ancien programme du Nouveau Front populaire, qui peut paraître aujourd’hui quelque peu dépassé ».
Non à une utilisation systématique du 49.3 pour la censure
En échange de leur absence de recours à la censure, les socialistes demandent aussi à François Bayrou de s’engager à ne pas recourir au 49.3. « Je pense que nouer un lien automatique entre ‘vous n’avez pas recours au 49.3, sinon on censure’ est une erreur », exprime l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac, qui se félicite de n’avoir jamais employé cet outil constitutionnel. « Je conseille à mes camarades socialistes, ainsi qu’aux écologistes et aux communistes, s’ils prêtent une oreille attentive à mes propos, de ne pas tomber dans une attitude systématique de sollicitation de la censure quand il est question du 49.3 », insiste-t-il. « On peut s’opposer de nombreuses manières autres que par la censure, sans quoi il n’y aurait eu que deux censures en soixante ans », précise Lionel Jospin.
« Cet article, le 49.3, fait partie intégrante de notre Constitution et peut s’avérer nécessaire à certains moments, par exemple pour faire passer le budget de l’État ou le projet de financement de la sécurité sociale », défend Lionel Jospin, tout en appelant le nouveau chef du gouvernement à en faire « un emploi mesuré ». Pour l’ancien Premier ministre socialiste, François Bayrou devrait « s’orienter davantage vers le Parlement plutôt que de se plier aux directives cachées ou subtiles du président, qui se doit d’adopter une attitude discrète ».