François Bayrou a désigné l’ex-ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, pour occuper le poste de garde des Sceaux, lundi.
Suite à la désignation de Gérald Darmanin au poste de ministre de la Justice le 23 décembre, le milieu judiciaire se montre perplexe. Après avoir quitté son poste au ministère de l’Intérieur trois mois auparavant, où il a exercé pendant quatre ans, Darmanin endosse désormais la responsabilité du ministère de la Justice dans le nouveau cabinet de François Bayrou. Un magistrat a exprimé son mécontentement en déclarant que « le ministère de la Justice semble être devenu une annexe indésirable de la République ».
Gérald Darmanin, issu d’un ministère où il possédait un pouvoir hiérarchique fort, s’installe place Vendôme, un lieu où l’indépendance des magistrats par rapport au pouvoir exécutif est cruciale. Cependant, en novembre dernier, Darmanin avait manifesté son indignation face à la possibilité que Marine Le Pen soit déclarée inéligible par la justice. Il avait exprimé sur X, le 13 novembre, son opinion quant aux réquisitions du procès des assistants parlementaires du Front national, en disant : « Il serait particulièrement inacceptable que Marine Le Pen soit déclarée inéligible et ainsi empêchée de participer à l’élection présidentielle devant les citoyens français. »
Une nomination inattendue pour les juges
L’Union syndicale des magistrats reçoit cette nomination avec des précautions. Le président, Ludovic Friat, a exprimé sa surprise et a exprimé ses attentes : « Je préfère pour l’instant être surpris plutôt qu’inquiet, puisque clairement, Gérald Darmanin n’était pas parmi les noms que l’on s’attendait à voir sous l’arbre de Noël gouvernemental. » Friat a reconnu que Darmanin avait bien soutenu les forces de l’ordre lorsqu’il était au ministère de l’Intérieur et précise : « Nous attendons de lui le même engagement avec le ministère de la Justice. »
Dans son premier message sur les plateformes sociales dès lundi soir, le nouveau ministre de la Justice a exprimé son « soutien inconditionnel envers les magistrats, les greffiers, les agents pénitentiaires, ceux du secteur de la protection judiciaire des mineurs et tous les collaborateurs de la justice. » Il a aussi assuré que « la rigueur, la célérité et la proximité guideront [son] action pour défendre les victimes ».
Des enjeux budgétaires en perspective
En 2021, Darmanin avait participé à une manifestation de policiers, qui avait suscité beaucoup de discussions, devant l’Assemblée nationale. Un leader syndical avait alors déclaré : « Le véritable ennemi de la police, c’est la justice ». Plus tard, Darmanin avait nuancé cette perspective dans une interview accordée au Parisien, affirmant que « le véritable problème de la police, c’est le manque de moyens attribués à la justice ».
Dans ce contexte, il sera particulièrement scruté sur les questions budgétaires, un sujet où son prédécesseur, Didier Migaud, avait réussi à protéger les moyens alloués avant une motion de censure. Selon Ludovic Friat, président de l’USM, « Le principal défi pour Gérald Darmanin sera de réussir aussi bien que Didier Migaud en matière de financement », comme il l’a mentionné lundi soir sur 42mag.fr. La justice espère des recrutements supplémentaires.
De gros dossiers l’attendent, certains en coopération avec Bruno Retailleau, son homologue à l’Intérieur, notamment dans la lutte contre le trafic de drogues. D’autres enjeux concernent directement la justice, tels que l’accélération des procès ou l’amélioration de l’application des sanctions. Des groupes de réflexion, initiés par Didier Migaud, doivent rendre leurs conclusions en février. « La non-exécution des peines est un problème majeur dans notre pays », a affirmé le Premier ministre François Bayrou sur BFMTV, lors d’une intervention lundi soir.