À la suite du procès pour viol collectif de Pelicot, un rapport parlementaire français a appelé à un changement fondamental de la définition juridique du viol dans le pays, faisant du consentement son élément central.
Le rapport, publié mardi par la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes, décrit comme un moment décisif l’affaire dans laquelle Gisèle Pelicot a été droguée et violée à plusieurs reprises par son mari et des inconnus qu’il avait recrutés en ligne.
Dominique Pelicot a été reconnu coupable de viol, et 50 autres prévenus de viol, tentative de viol ou agression sexuelle. Cependant, le procès a également permis de mettre en lumière les failles dans la manière dont le droit français traite les violences sexuelles, la défense s’appuyant sur des stéréotypes dépassés et remettant en question la crédibilité de la victime.
« Maintenant que le procès pour viol de Mazan (le village dans lequel les crimes ont eu lieu) est terminé, qui a été à bien des égards un procès contre la culture du viol elle-même, il est temps d’agir », a déclaré la mission parlementaire.
Les co-auteurs du rapport, les députées Véronique Riotton et Marie-Charlotte Garin, soutiennent que la loi doit être réformée de toute urgence.
« La nouvelle définition doit préciser que le consentement est spécifique, doit être donné librement et peut être retiré à tout moment », indique le rapport.
Un procès pour viol collectif relance la question du consentement en droit français
Redéfinir le viol
La loi française définit actuellement le viol comme « tout acte de pénétration sexuelle, quelle qu’en soit la nature, ou tout acte oro-génital commis sur autrui ou sur la personne de son auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ».
Même si ces critères existants seraient préservés, l’ajout du non-consentement permettrait de répondre aux cas de paralysie, de contrôle coercitif ou d’exploitation de situations vulnérables, qui échappent actuellement au champ d’application de la loi.
« En modifiant la loi, ce que nous voulons faire, c’est réaffirmer que pour qu’une relation soit qualifiée de sexuelle, il faut qu’il y ait un consentement libre. Sinon, c’est un acte de violence, de domination, c’est un viol », a déclaré Garin à 42mag.fr.
« Nous devons clarifier la loi, rappeler aux gens ce qui constitue la sexualité et ce qui constitue la violence et la domination. Et la meilleure façon d’y parvenir est d’inclure la notion de consentement.
Le procès charnière des années 1970 qui a réécrit la définition française du viol
Le consentement « militarisé »
La mission parlementaire a souligné les failles dans la manière dont les cas de viol sont traités, affirmant que « sans une définition claire », le consentement est « souvent utilisé comme arme par les agresseurs ».
Selon eux, cela alimente les stéréotypes néfastes sur le viol, décourage les victimes de porter plainte et aboutit dans de nombreuses affaires au non-lieu.
« La définition actuelle renforce les préjugés sociétaux sur ce qui fait une « bonne » victime – quelqu’un qui résiste, se bat et se comporte « de manière exemplaire » – et ce qui constitue un « vrai » viol, impliquant la violence et la coercition de la part d’un agresseur monstrueux ou étranger », a-t-elle ajouté. affirme le rapport.
Rassemblements dans toute la France pour soutenir une femme droguée et violée
Réponse divisée
La proposition a suscité un large débat en France.
Même si le président Emmanuel Macron soutient la réforme, ses critiques estiment qu’elle pourrait compliquer les procédures judiciaires. Certains préviennent que cela pourrait faire peser la charge de la preuve sur l’accusé, tandis que d’autres craignent que cela puisse conduire à ce qu’ils appellent la « contractualisation des relations sexuelles ».
Même les organisations féministes sont divisées. Certains considèrent la réforme comme une étape cruciale vers la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul, que la France a ratifiée en 2014. D’autres s’inquiètent du fait que la loi pourrait encore ne pas répondre aux situations dans lesquelles le consentement est contraint ou manipulé.
Le Conseil d’État français examine actuellement le projet de loi pour s’assurer qu’il répond aux normes juridiques avant son introduction formelle.