La proposition de loi visant à combattre le trafic de drogues inclut cette mesure notable. Le document suggère la création d’un « dossier coffre » afin de maintenir confidentielles les méthodes utilisées par la police lors des enquêtes.
Un texte très attendu va être discuté à partir de ce mardi 28 janvier au Sénat : la proposition de loi visant à combattre le trafic de drogue. Parmi les mesures proposées se trouve la création d’un parquet national dédié à la lutte contre la criminalité organisée, ainsi que le renforcement d’un office des stupéfiants, inspiré par l’agence américaine de lutte antidrogue.
Le projet de loi inclut également l’introduction d’un statut pour les repentis. Bien qu’il suscite dans l’ensemble un soutien large, certaines propositions sont controversées, notamment l’instauration d’un « dossier coffre ».
« Des organisations très bien structurées et adaptatives »
Dans des enquêtes de plus en plus complexes face à des réseaux criminels bien organisés, l’objectif est de garder secrètes les méthodes policières utilisées. Un principe qui fait réagir vivement les avocats. Une juge d’instruction expérimentée dans les affaires de criminalité organisée a fait ce constat il y a un an devant les sénateurs. « Ces structures sont extrêmement organisées et savent ajuster leurs stratégies pour échapper aux autorités« , déclarait-elle à l’époque.
Sophie Aleksic, lors de son audition par la commission d’enquête, a exposé les difficultés qu’elle rencontre au quotidien : « Nos dossiers judiciaires obéissent au principe du contradictoire, nous devons donc tout dévoiler, ce qui permet aux trafiquants de comprendre comment ils ont été appréhendés et de réagir en conséquence. »
« Un autorisation à contourner les règles »
Les sénateurs ont pris cela en considération et, pour empêcher que les trafiquants connaissent les méthodes de surveillance des enquêteurs, ils suggèrent de ne laisser accessible aux avocats que les résultats des enquêtes. Les procès-verbaux décrivant les techniques d’investigation, tels que l’utilisation d’indicateurs, d’agents infiltrés et de moyens de surveillance technique, resteraient confidentiels.
Pour Romain Boulet, vice-président de l’association des avocats pénalistes, cela porterait atteinte aux droits de la défense. « C’est comme si on autorisait la police et les magistrats à contourner les règles, sous un prétexte qui semble légitime aux yeux du public : appréhender des criminels. Personnellement, je suis convaincu qu’on parviendra à être bien plus efficace en augmentant le nombre de policiers et de magistrats plutôt qu’en restreignant les droits de la défense. »
Les avocats pourront défier la constitutionnalité de ce « dossier coffre », un concept inspiré par la Belgique où le système a été approuvé.