Jeudi, l’Assemblée se penche sur une proposition de loi visant à exiger que les consommateurs donnent leur accord avant de recevoir des appels à caractère commercial.
Imaginez un monde où les appels indésirables de prospection téléphonique n’existent plus. Un projet de loi discuté le jeudi 6 mars à l’Assemblée nationale vise à limiter ces pratiques intrusives. Cette initiative, mise en avant par le MoDem, propose de demander un consentement explicite de la part des consommateurs avant toute sollicitation. Déjà approuvée par le Sénat, cette mesure rencontre un écho favorable. Pascal Lecamp, député de la Vienne, exprime son ras-le-bol, affirmant qu’il est sollicité une dizaine de fois par jour par ces appels. L’objectif est de mettre des limites à un phénomène endémique : en 2023, une enquête de l’UFC-Que Choisir révélait que 72% des Français recevaient au moins un appel de démarchage chaque semaine, avec 38% en recevant quotidiennement. Nous examinons ce que prévoit ce texte.
1 Quelles sont les mesures proposées par cette loi ?
Le projet de loi prévoit d’introduire une obligation pour les entreprises de collecter l’accord explicite des consommateurs avant de les appeler pour des activités de démarchage. Cela signifierait que sans ce consentement formel, les entreprises ne pourraient plus contacter les consommateurs, sauf accord exprès préalable pouvant être obtenu par divers moyens comme un clic sur une case lors de la visite d’un site internet ou par des échanges directs avec les entreprises.
La proposition inclut la possibilité d’étendre cette interdiction à d’autres secteurs, grâce à un amendement de la députée Delphine Batho, notamment ceux liés à l’adaptation pour le vieillissement et le handicap.
De plus, la loi chercherait à réduire les heures et la fréquence autorisées pour ces appels. Actuellement, les appels peuvent avoir lieu sur une période de neuf heures par jour, mais cela serait réduit à sept heures, avec un maximum de deux appels par entreprise sur une période de 60 jours.
D’autre part, des sanctions plus strictes seraient appliquées en cas de non-respect des nouvelles règles, spécifiquement pour les abus qui exploitent les vulnérabilités des consommateurs.
2 Quelles sont les règles actuelles en matière de démarchage téléphonique ?
Actuellement, les consommateurs peuvent s’enregistrer gratuitement sur Bloctel, un service d’opposition au démarchage téléphonique. Cependant, ce dispositif est souvent critiqué pour son inefficacité et le manque de dissuasion qu’il représente pour les contrevenants. En 2023, environ 60% des entreprises parmi les 5 300 inspectées ne respectaient pas ces règles, avec des amendes totalisant seulement quatre millions d’euros, selon le rapporteur.
Selon les régulations en vigueur depuis le 1er mars 2023, que vous soyez inscrit ou non sur Bloctel, les entreprises ne peuvent vous appeler qu’entre 10 heures et 20 heures en semaine, tout en respectant des pauses entre 13 heures et 14 heures, et sont interdites de sollicitation le week-end et les jours fériés, sauf consentement explicite pour un appel précis.
Certaines industries, comme celle de la rénovation énergétique et de la formation professionnelle, sont déjà exclues du démarchage téléphonique.
3 Quelle est la probabilité que cette loi soit adoptée ?
Ce texte législatif est la priorité de la niche parlementaire du MoDem, qui se poursuit jusqu’à minuit. Déjà validé par le Sénat le 14 novembre, il bénéficie d’un accueil consensuel à l’Assemblée nationale. Des amendements réunissant divers partis ont été intégrés lors de l’examen en commission, ce qui laisse penser qu’une version similaire à celle du Sénat pourrait être adoptée. Si tel est le cas, la loi deviendrait applicable dès le 1er janvier 2026.
4 Quelle est la réaction des organisations de consommateurs ?
Les associations de consommateurs sont naturellement favorables à ce projet de loi. En novembre, onze d’entre elles ont soutenu publiquement l’initiative avant sa discussion au Sénat. L’UFC-Que Choisir a récemment demandé aux députés d’approuver le texte, soulignant qu’il représente une avancée majeure pour les droits des consommateurs, fruit d’un long combat. Sa présidente, Marie-Amandine Stévenin, insiste sur l’importance de ne pas affaiblir cette loi par de nouvelles exceptions, afin de protéger le droit à la tranquillité de chacun.
Le magazine « 60 millions de consommateurs » partage cet enthousiasme, tout en soulignant qu’une pédagogie est nécessaire pour garantir l’efficacité de cette nouvelle législation. Il s’agit d’assurer une bonne information sur les droits des consommateurs. Cependant, des interrogations subsistent concernant l’impact réel de la loi et ses possibles conséquences sur l’emploi.