Lors d’un tournage, deux actrices ont porté des accusations d’agressions sexuelles contre un acteur, qui doit désormais faire face à la justice pour ces faits. Cette situation s’inscrit dans un contexte plus large de révélations sur les violences sexistes et sexuelles dans l’industrie culturelle.
Lundi 24 mars, le tribunal correctionnel de Paris a vu s’ouvrir le procès de Gérard Depardieu. L’acteur, âgé de 76 ans, était présent pour répondre des accusations d’agressions sexuelles impliquant deux femmes durant le tournage du film Les Volets verts en 2021. Depuis 2018, une vingtaine de femmes ont affirmé avoir été victimes de comportements similaires de la part de l’acteur, ce qui fait de lui la personnalité la plus célèbre rattrapée par le mouvement #Metoo.
Adèle Haenel et l’impact initial de Metoo
En 2018, un an après la retentissante affaire Weinstein aux États-Unis, Charlotte Arnoult, comédienne, accuse Gérard Depardieu de viol et d’agression sexuelle, devenant ainsi la première femme à déposer plainte. L’acteur a d’ailleurs été mis en examen en 2020 pour ces accusations. Toutefois, c’est un autre événement qui secouera véritablement l’industrie cinématographique française, longtemps marquée par le silence. À l’automne 2019, Adèle Haenel dénonce publiquement, dans une vidéo pour Mediapart, le « harcèlement sexuel » qu’elle a subi de la part du réalisateur Christophe Ruggia entre ses 12 et 15 ans.
Ce dernier, reconnu coupable des actes d’agressions sexuelles envers l’actrice, a été condamné à deux ans de prison ferme le 3 février 2025, mais a choisi de faire appel de la décision.
Quelques mois après cette révélation, lors de la cérémonie des César, Adèle Haenel exprime bruyamment son désaccord en quittant la salle, suite à la distinction de Roman Polanski, un metteur en scène polonais accusé de viol, en tant que meilleur réalisateur. Ses mots « C’est la honte, c’est la honte » résonnent et deviennent un symbole de la vague Metoo en France, provoquant un large élan de soutien et de témoignages de la part d’autres victimes. Néanmoins, sur le plan politique, les retombées se font attendre.
La nouvelle impulsion donnée par Judith Godrèche
Une seconde vague de dénonciations prend de l’ampleur durant l’hiver 2023-2024 grâce au témoignage de Judith Godrèche. Après avoir discuté publiquement des abus qu’elle a subis durant son adolescence, elle dépose plainte contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon.
Lors d’une intervention à l’académie des Césars, l’actrice et réalisatrice interpelle directement l’industrie du cinéma : « Depuis quelques temps je parle, je parle, mais je ne vous entends pas ». Elle admettra par la suite que son discours visait à « fédérer et provoquer des décisions politiques importantes ». Suite à cette prise de paroles, en mars 2024, Judith Godrèche est entendue par le Sénat où elle réclame la mise en place d’une commission d’enquête sur les violences sexistes et sexuelles dans le cinéma.
Enquête sur cinq mois et premières propositions
Deux mois plus tard, en mai, l’Assemblée nationale adhère aux recommandations de l’actrice et réalisatrice. Elle lance une commission dédiée à l’étude des « abus et violences » dans le secteur de la culture, avec pour mission de briser le silence et de proposer des mesures concrètes. Durant cinq mois, acteurs, actrices, directeurs de casting, producteurs et réalisateurs ont été consultés, tout comme des collectifs représentant les victimes.
Certaines idées commencent déjà à émerger, telles que l’amélioration de la formation et du statut des référents chargés de lutter contre le harcèlement, ou encore l’obligation de présence d’un adulte référent lors des tournages impliquant des enfants. Le rapport final de cette commission est espéré pour début avril 2025.