Mercredi, les législateurs ont voté en faveur de l’élimination des zones à faibles émissions. Depuis 2019, 42 de ces zones ont été introduites progressivement à travers la France.
La suppression des zones à faible émission (ZFE) semble être en vue alors que les députés ont approuvé deux amendements dans ce sens, mercredi 26 mars, lors d’une réunion de la commission à l’Assemblée nationale. Cette décision a été prise en marge de l’étude du projet de loi « simplification ». Les ZFE sont des zones où les véhicules les plus polluants, portant les vignettes Crit’air 3, 4 et 5, sont interdits, avec pour objectif principal de combattre la pollution de l’air.
Ces amendements représentent une première avancée vers l’élimination des 42 ZFE existantes, dont certaines sont particulièrement rigoureuses comme celles de Paris, Lyon, Montpellier et Grenoble. Ce pas en avant réjouit les partis de droite et d’extrême droite mais inquiète les organisations de protection de l’environnement et de la santé. Quant aux automobilistes et autres utilisateurs, les opinions divergent.
« Une fracture territoriale »
Dans la métropole du Grand Paris, plus de 1,5 million de véhicules sont concernés par des vignettes de classification élevée. Les avis des propriétaires de ces véhicules sont partagés. Prenons l’exemple de Talia, une conductrice qui, tous les jours, parcourt 50 kilomètres aller-retour entre Noisy-le-Sec, en Seine-Saint-Denis, et Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine. Une vignette Crit’air 3 orne le pare-brise de sa voiture, ce qui signifie que son véhicule est théoriquement interdit à Paris et ses alentours. Talia est consciente d’être directement concernée mais elle refuse de changer de voiture : « Actuellement, je ne peux pas me le permettre financièrement. C’est trop coûteux et ma voiture fonctionne très bien », dit-elle. Les amendements votés par les députés lui apportent donc un soulagement : « Je n’aurai plus à m’inquiéter des amendes », exprime-t-elle avec satisfaction.
Le député RN Pierre Meurin qualifie les ZFE de « scission sociale, une fracture territoriale ». Il déclare, « Nous devons assumer la responsabilité de mettre fin à l’absurdité des ZFE ». Meurin a proposé l’un des amendements adoptés, tout comme le second, défendu par Les Républicains. Les députés LR, du RN et quelques macronistes ont voté en faveur de ces amendements, tandis que certains députés de gauche se sont abstenus.
« Vous empêchez les personnes avec de vieux véhicules, qui ne peuvent pas en acheter de nouveaux, d’aller en centre-ville, peut-être même de travailler. »
un automobilisteà 42mag.fr
Ce sentiment est partagé par un cadre parisien, rencontré à une station-service près du périphérique de la capitale. Il perçoit aussi les ZFE comme une injustice sociale : « Je trouve cela discriminatoire, surtout dans les petites villes dépourvues de transports en commun. Donc, leur suppression me semble une bonne décision. »
Cependant, Éric et Tarik, deux chauffeurs de taxi, ne cachent pas leur mécontentement. « Pourquoi avoir une vignette si les mesures associées disparaissent ? interroge l’un. La vraie question, continue l’autre, c’est qu’on a poussé à l’adoption de véhicules électriques ou hybrides. Les gens ont investi financièrement et maintenant on retourne en arrière. Cela crée un problème car nous avons dépensé beaucoup pour nous conformer à ces normes, alors que le prix des voitures électriques reste élevé. »
Promouvoir à nouveau les voitures écologiques
Perrine, Parisienne, privilégie l’environnement. Elle n’a pas de voiture, se déplace en transports en commun et déplore que l’écologie ait encore été reléguée au second plan. Selon elle, « Avoir une vraie politique écologique, c’est crucial. Que ce soit pour faire du sport ou simplement sortir, une plus grande pollution a des conséquences néfastes sur la santé. »
« Actuellement, on régresse beaucoup sur plusieurs aspects écologiques, et ce n’est pas un signe encourageant. »
Perrine, Parisienneà 42mag.fr
Selon Tony Rénucci de l’association Respire, éliminer les ZFE est une décision irresponsable et ne résoudra pas les milliers de décès et les nombreuses maladies respiratoires et cardiovasculaires causées chaque année par la pollution en France. Il préconise plutôt d’aider les foyers à acquérir des véhicules moins polluants, une direction inverse de celle prise actuellement. « Le gouvernement a retiré la prime à la conversion et diminué le bonus écologique, souligne-t-il. J’espère voir une proposition de loi qui rétablisse ces aides pour permettre l’achat de véhicules écologiques et rendre les ZFE effectives. » Pourtant, ce sujet reste absent des projets législatifs en cours, trois propositions cherchant plutôt à supprimer ou suspendre les ZFE ayant été soumises au Parlement.