Durant cette semaine, un spécialiste de l’histoire dévoile la réalité des sociétés secrètes, bien loin de l’influence mondiale souvent exagérée qu’on leur attribue.
Pour saisir pourquoi les théories du complot ont connu un tel engouement ces dernières années, que ce soit en France durant la pandémie de Covid-19 ou aux États-Unis avec le mouvement QAnon, il est essentiel de considérer l’attrait historique du concept de « société secrète. »
Distinguer le réel de l’imaginaire
Le terme « société secrète » évoque souvent une autorité cachée contrôlant réellement un pays, voire le monde entier, ce que certains désignent aujourd’hui sous l’appellation « État profond. »
Pierre-Yves Beaurepaire ne cherche pas à nier la présence de sociétés secrètes. Au contraire, il en décrit les plus significatives depuis le XVIIe siècle jusqu’à nos jours, explorant leurs codes, valeurs et buts. Toutefois, il s’emploie aussi à distinguer la part de vérité de celle du mythe qui les entoure.
Parmi les sociétés secrètes les plus anciennes mentionnées dans son ouvrage figurent les Illuminati, illustrant parfaitement le passage de la vérité à la fiction.
L’imaginaire autour des Illuminati
Une société des Illuminés a réellement vu le jour en Allemagne à la fin de l’ère des Lumières, mais elle est sans lien avec ce réseau mondial qu’on suppose être capable de menacer des institutions comme le Vatican, tel que décrit dans le roman de Dan Brown Anges et démons, ou de manipuler des élections, accusations portées aux États-Unis.
Ce phénomène de fantasmagorie date en réalité du XIXe siècle, une époque où une série de révolutions a bouleversé l’Occident, favorisant ainsi l’émergence des théories conspirationnistes.
Dans l’histoire des sociétés secrètes, il y a un invariant : elles « nous proposent une manière de décoder le chaos du monde, explique Pierre-Yves Beaurepaire. Une méthode qui à la fois nous apaise et alimente nos angoisses. »
L’influence des œuvres populaires
À l’instar de Dan Brown, de nombreux créateurs ont contribué à cette fusion continue entre faits historiques et imagination débordante.
Pierre-Yves Beaurepaire mentionne notamment la bande dessinée V pour Vendetta, qui prend comme point de départ une véritable conspiration contre le Parlement anglais au XVIIe siècle. Le fameux masque arboré par les Anonymous au XXe siècle en est directement inspiré.
L’auteur parle aussi d’Harry Potter et l’Ordre du Phénix, où un ordre secret est fondé par le personnage de Dumbledore. Curieusement, le phénix est également l’emblème de l’Ordre de la Rose-Croix, qui avait captivé la France sous le règne de Louis XIII.
Ainsi, la culture populaire, tout comme l’Histoire, nous familiarisent avec l’idée d’une éventuelle société secrète. À une époque où les faits peinent parfois à se faire entendre, l’historien entend offrir ce qu’il appelle « des clés de lecture » pour affronter ce phénomène.