Depuis 40 ans, chaque nouveau Premier ministre est confronté à ce dossier récurrent, mais malgré cela, cette réforme n’est jamais mise en œuvre.
La problématique de la réorganisation de l’État redevient prioritaire à chaque changement de Premier ministre. « Il est nécessaire de reconstruire intégralement : les règlements, les lois, les normes, et les pratiques « , affirmait François Bayrou il y a seulement deux mois. De son côté, Édouard Philippe avait déclaré dès 2018 : « Nous allons entreprendre une transformation profonde de l’action publique pour édifier un État performant« . Il ne faut pas non plus oublier le candidat Macron qui, en 2017 dans son ouvrage intitulé Révolution, proclamait : « La réorganisation de l’État doit restituer le pouvoir à ceux qui agissent« . Pour François Bayrou, qui qualifie ces défis de son « Himalaya de difficultés« , cette réforme de l’État devient son propre Annapurna. Le problème ? Quarante années ont passé, et cette réforme demeure aussi insaisissable que le yéti.
En premier lieu, les gouvernements adoptent trop souvent une approche essentiellement financière. La réforme de l’État est rarement envisagée autrement qu’une solution rapide pour combler les déficits budgétaires. Autrement dit, il s’agit d’opérer des coupes budgétaires urgentes. Un exemple notable est celui de la RGPP, la révision générale des politiques publiques menée sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui comprenait le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux. Depuis cette période, l’idée de réduire les dépenses revient inévitablement lors des discussions budgétaires. Un autre problème est que chaque Premier ministre successif multiplie les annonces retentissantes de révolutions administratives qui peinent à se concrétiser.
La division droite-gauche
Malgré cela, des changements ont lieu, même s’ils peuvent sembler lents. Le système administratif français, souvent comparé à un millefeuille indigeste, évolue pourtant bel et bien. De la décentralisation à la déconcentration, l’État et ses fonctionnaires se transforment sans cesse. Toutefois, ils se retrouvent entre le discours d’une gauche qui s’insurge dès qu’il est question de « réductions » ou de « simplification », et celui d’une droite qui présente les services publics comme des mammouths dispendieux et inutiles.
Ce débat bipolaire alimente une image dangereuse dans l’arène politique française : celle symbolisée par la tronçonneuse du président argentin Javier Milei, brandie par Éric Ciotti et ceux qui rêvent de démanteler l’État. Une vision qui inquiète ceux qui comprennent que c’est le modèle social français lui-même qui pourrait être anéanti. Cependant, comme le remarquait un ancien Premier ministre, « la réforme de l’État ne doit pas être une simple question de ‘plus’ ou ‘moins’ d’État. Il s’agit de s’appuyer sur la consultation, d’améliorer la qualité du service public offert aux citoyens et de rendre la dépense publique plus efficace« . C’était une déclaration de Lionel Jospin en 2000. Et après toutes ces années, l’objectif reste inchangé.