Un projet de loi discuté le 12 mai suggère d’exclure les associations des centres de rétention administrative afin d’attribuer à l’Office français de l’immigration et de l’intégration, sous la supervision du ministère de l’Intérieur, la tâche de fournir des informations concernant les droits des étrangers.
Les organismes chargés d’apporter une assistance juridique aux étrangers détenus dans les centres de rétention administrative (CRA), en perspective de leur expulsion, expriment leur inquiétude face à une proposition de loi qui sera bientôt discutée au Sénat. Cette proposition chercherait à les exclure avec pour argument un manque de « neutralité » de leur part.
« Nous sommes très préoccupés car les raisons avancées sont fausses, voire trompeuses. On nous reproche de ne pas effectuer correctement notre devoir et de promouvoir l’illégalité, alors que notre mission est de défendre les droits des personnes », déclare à l’AFP Sylvestre Wozniak, directeur général de Forum réfugiés. Cette association est l’une des cinq organisations mandatées par l’État pour intervenir dans les CRA.
Décortiquée le 12 mai, la proposition de loi initiée par Marie-Carole Ciuntu, sénatrice du parti Les Républicains, propose de retirer les associations des CRA pour transférer le « rôle d’information sur l’accès aux droits des étrangers » à l’Office français de l’immigration et de l’intégration, un organisme dépendant du ministère de l’Intérieur.
Dans le document soumis au Sénat, il est indiqué que « les associations opérant dans ces centres ne possèdent aucun pouvoir décisionnel, mais toutefois, les conditions dans lesquelles elles agissent actuellement soulèvent des questions sur l’impartialité de l’aide qu’elles proposent ».
« Un danger démocratique majeur »
Les initiateurs du texte se questionnent notamment sur « la possibilité que les associations (…) participent à une stratégie délibérée de multiplication des recours, susceptible d’entraver les politiques en vigueur contre l’immigration illégale ».
À l’inverse, Najat Vallaud-Belkacem, présidente de France Terre d’Asile, s’interroge : « Est-ce envisageable que l’administration soit à la fois responsable de la rétention et de l’information sur les droits des détenus ? » Elle affirme qu’« il est impossible d’être juge et partie, sauf si l’on souhaite, silencieusement et progressivement, démanteler les garanties qui définissent un État de droit ».
Selon Fanélie Carrey-Conte, secrétaire générale de la Cimade, cette loi cherche à « réduire les capacités des individus à faire valoir leurs droits, en particulier ceux liés aux recours prévus par la Constitution ». Elle poursuit en disant qu’« elle vise aussi à limiter le rôle témoignage et de veille des associations sur les événements se produisant à l’intérieur de ces lieux. Cela représente un danger démocratique majeur ».