Suite à la relance d’une opération militaire majeure sur le terrain dans la région de Gaza, la France, le Royaume-Uni et le Canada ont publié une déclaration conjointe dans laquelle ils avertissent qu’ils pourraient imposer des mesures punitives contre le gouvernement israélien, qu’ils accusent de bloquer l’accès à l’aide humanitaire. Par ailleurs, même les États-Unis, traditionnellement alliés d’Israël, commencent à se distancier de cette position.
La tonalité utilisée est d’une rare fermeté. Le lundi 19 mai, au lendemain de la relance d’une offensive terrestre israélienne dans la bande de Gaza, les chefs d’État français, britannique et canadien publient une déclaration conjointe dans laquelle ils s’engagent à ne pas rester « inactifs face à la poursuite par le gouvernement Nétanyahou de ces actes révoltants« .
Ils affirment ainsi une prise de position sans ambiguïté, assortie d’un avertissement clair concernant la possibilité de mettre en œuvre « des actions concrètes si Israël ne cesse pas son offensive militaire actuelle et ne lève pas les restrictions imposées à l’aide humanitaire« . Par ailleurs, ils déclarent être « résolus à reconnaître l’existence d’un État palestinien« , annonçant un rendez-vous aux Nations unies en juin, lors d’un sommet dédié à la solution à deux États, coorganisé par la France et l’Arabie saoudite.
Les États-Unis s’affranchissent de la tutelle de Nétanyahou
En réponse, Benyamin Nétanyahou dénonce une « énorme faveur » accordée au Hamas, reprenant une rhétorique habituelle qui assimile toute initiative concernant l’avenir palestinien à un « cadeau fait aux terroristes« .
Cette situation illustre surtout une évolution notable de l’équilibre diplomatique au fil des mois. Initialement, Emmanuel Macron se disait prêt à envisager la reconnaissance d’un État palestinien, et il semble aujourd’hui rallier ses homologues britannique et canadien à cette position. On observe ainsi la montée en puissance d’un nouvel alignement diplomatique formé par Paris, Londres et Ottawa, déjà très engagé sur la question ukrainienne, qui prend de plus en plus d’ampleur face à une politique américaine de plus en plus autonome et solitaire à l’échelle internationale.
Washington, tout en maintenant un soutien à son allié israélien, agit fréquemment en parallèle, en dehors de la sphère d’influence directe de Benyamin Nétanyahou, démontrant que ses intérêts stratégiques priment avant tout. Par exemple, la libération d’otages a été négociée directement avec le Hamas, tandis que la sécurité en mer Rouge a fait l’objet de discussions avec les Houthis du Yémen. La reprise des négociations avec l’Iran constitue un nouveau camouflet pour le Premier ministre israélien, tout comme la rencontre récente à Riyad entre Donald Trump et le nouveau président syrien. Par ailleurs, il est notable que le président américain n’ait pas inclus Israël dans son itinéraire lors de sa tournée dans le Golfe, tandis que la venue de son vice-président, J.D. Vance, autrefois prévue cette semaine, a été retirée des programmes officiels.
Nétanyahou privilégie avant tout sa survie politique
Tous ces éléments traduisent un isolement grandissant sur la scène diplomatique pour Benyamin Nétanyahou, qui doit aussi faire face à une opposition croissante dans son propre pays. Sa politique de guerre totale suscite une colère intense au sein d’une population en majorité favorable à l’ouverture de négociations destinées à obtenir la libération des derniers otages détenus à Gaza. Pris dans les filets d’affaires judiciaires, le Premier ministre semble avant tout préoccupé par le maintien de son pouvoir, s’inclinant devant les factions les plus radicales de son gouvernement, qui détiennent un poids politique disproportionné et peuvent à tout moment faire chuter sa coalition.
Ce cynisme intense rivalise avec celui des dirigeants du Hamas, qui, derrière les atrocités commises le 7 octobre 2023, n’ont à offrir à leur propre peuple que douleur et détresse, et qui réclament aujourd’hui un cessez-le-feu principalement pour pouvoir se targuer d’avoir survécu au conflit. Dans ce paysage dévasté, 2 millions de personnes souffrent de la faim, tandis que les appels à la paix peinent à se faire entendre.