Élue lors des élections municipales de 2020, elle remet son mandat en janvier 2025, épuisée par l’exercice de ses fonctions. À six mois de là, Marie Cau réside encore à Tilloy-lez-Marchiennes. Elle se penche sur ces cinq années passées à la mairie, autant riches qu’éprouvantes.
Le 14 janvier 2025, la maire de Tilloy-lez-Marchiennes, petit village de 530 habitants situé près de Valenciennes, adresse sa démission au préfet du Nord. Marie Cau avait marqué l’histoire en devenant la première femme transgenre élue à ce poste en France, en 2020. Son mandat n’ira pas jusqu’à son terme : épuisée par l’exercice du rôle, elle se retire après être tombée en minorité au sein de son conseil municipal. « Les agressions que j’ai subies, ce sont surtout des agressions en tant que maire », résume-t-elle à ce moment-là. « Les gens, quand ils viennent voir un maire, au lieu de dire “j’ai un problème, qu’est-ce qu’on peut faire pour trouver une solution”, ils commencent par lui crier dessus. »
« Ça a été une super expérience », confie Marie Cau, six mois après son départ. Elle demeure à Tilloy-lez-Marchiennes, en face même de la mairie, et garde un souvenir majoritairement positif de son passage en tant qu’élue d’un village.
« Quand on est une personne transgenre, on se cache toute la vie. Être une personne qui devient connue et appréciée pour ce qu’elle est, c’est une rédemption quelque part, ça fait du bien. »
Marie Causur 42mag.fr
« C’est une expérience qui est extrêmement positive », poursuit-elle. « Malheureusement, c’est ce qu’on observe un peu partout dans les petites communes : il s’agit toujours d’une minorité de personnes un peu toxiques, qui nourrissent des enjeux égoïstes et politiques, et c’est vraiment dommage. » Elle ne regrette pas cette aventure, plutôt la manière dont « notre société évolue ». Elle espérait impulser une dynamique, mais n’a pas réussi à « mobiliser » ses concitoyens. « Les habitants sont casaniers et ne souhaitent pas s’impliquer. Organiser un événement du village devient alors ardu. Cela devient très fermé sur lui-même. Si les gens ne veulent pas s’investir, je ne peux rien faire. »
Être une personne transgenre ne m’a pas aidé
Elle l’admet : « être une personne transgenre ne m’a pas facilité la tâche ». Cependant, elle précise que ce n’était pas là le principal obstacle rencontré. Le plus difficile résidait dans les difficultés communes à bien des maires ruraux : le manque de moyens et des habitants qui veulent tout, tout de suite. « Le fait d’être une personne transgenre n’a pas amélioré les choses. Il a été plus facile pour certains de se moquer ou de me dénigrer, sans que cela passe au grand jour. Dans un village, tout finit par se savoir. Des propos ouvertement transphobes ont été tenus, c’est clair. C’était un facteur aggravant, mais ce n’était pas l’élément principal. »
« Quand vous êtes une personne LGBT, soit vous survivez, soit vous crevez, faut être réaliste. »
Marie Causur 42mag.fr
Elle affirme que, en tant que personne LGBT, elle a l’habitude de voir fleurir des attaques personnelles. Ce qui la dérangeait surtout, c’était sa notoriété. « Cela a suscité beaucoup de jalousie », explique-t-elle. « On me disait “Oui, elle ferait mieux de s’occuper de la mairie”, alors que je travaillais dix heures par jour pour la mairie, et ce n’était jamais suffisant. On m’a beaucoup critiquée alors que j’ai obtenu beaucoup pour le village et que j’ai fait avancer des projets justement grâce à ma notoriété. »
Cette expérience lui donne-t-elle envie d’un nouveau mandat ? « Dans tous les cas », répond-elle, « je vais apporter mon soutien aux associations et continuerai à porter une voix qui est singulière ». À court terme, elle préfère toutefois se reposer après « cinq années de travail intense » et « deux années de harcèlement constant à la mairie », qui l’ont « épuisée ». « Après, j’ai encore plein d’idées », assure-t-elle.