La présidente du Syndicat de la magistrature a répliqué à l’entretien que Nicolas Sarkozy a accordé au JDD, entretien dans lequel il dénonce une prétendue volonté d’humilier la justice lors de sa condamnation à cinq années d’emprisonnement dans l’affaire du financement libyen.
Selon Judith Allenbach, dirigeante du Syndicat de la magistrature, Nicolas Sarkozy « met de l’huile sur le feu » en s’en prenant aux juges après sa condamnation dans l’affaire dite du financement libyen, affirme-t-elle ce dimanche sur 42mag.fr. Dans un entretien accordé au Journal du Dimanche, l’ancien chef de l’État a dénoncé ce qu’il décrit comme une « volonté d’humiliation » émanant du pouvoir judiciaire. En réagissant ainsi, Sarkozy alimente ce ressentiment et aggrave la collision verbale en cours, affirme Judith Allenbach. Par ailleurs, le Syndicat de la magistrature a exprimé, dans un communiqué publié ce dimanche, son regret devant le silence « assourdissant » d’Emmanuel Macron face aux menaces pesant sur la présidente du tribunal qui a prononcé la condamnation de l’ancien président.
« C’est inacceptable puisqu’il n’y a aucune haine, il n’y a aucun ‘cas’ Nicolas Sarkozy dans la magistrature. Ce monsieur a été jugé comme n’importe quel autre justiciable. Les magistrats traitent des dossiers, ils ne jugent pas en fonction de leurs affects, ils ne jugent pas un programme politique et ils ne jugent pas en fonction d’arrière-pensées ou de sentiments. Ils jugent en fonction de la loi et du droit », rappelle-t-elle. Le tribunal correctionnel de Paris a infligé jeudi à l’ancien président une peine de cinq ans d’emprisonnement assortie d’une incarcération prochaine. Sarkozy a interjeté appel. Depuis cette condamnation, la présidente du tribunal est exposée à des menaces de mort sur les réseaux sociaux.
Ne pas mélanger l’expression syndicale et l’exercice du jugement
Judith Allenbach a également été interrogée sur la participation de la présidente du tribunal à une manifestation à Nice en 2011 (à l’époque où Nicolas Sarkozy était président). À cette période, la magistrate avait manifesté contre les propos de l’ancien chef de l’État tout en représentant l’antenne locale de l’Union syndicale des magistrats (USM), qui se revendique « apolitique et pluraliste ». La responsable du Syndicat de la magistrature soutient qu’il faut absolument distinguer l’expression syndicale de l’action judiciaire — elle affirme que « il ne faut jamais confondre l’expression syndicale avec l’acte de juger ». « Les juges savent parfaitement faire la différence entre l’expression syndicale et lorsqu’ils exercent leur fonction juridictionnelle ; cela n’a strictement rien à voir et il serait extrêmement dangereux de laiser croire qu’une confusion serait possible entre les deux », souligne-t-elle.
Nicolas Sarkozy, alors président, avait imputé une part de responsabilité aux magistrats dans le meurtre de Laëtitia Perrais en Loire-Atlantique, assassinée par Tony Meilhon, déjà condamné pour d’autres faits, en affirmant que « quand on laisse sortir de prison un individu comme le présumé coupable sans s’assurer qu’il sera suivi par un conseiller d’insertion, c’est une faute ». Le président avait alors promis que « ceux qui ont couvert ou laissé faire cette faute seraient sanctionnés ». Ces propos avaient suscité une forte mobilisation des magistrats, avec des suspensions et des reports d’audiences dans tout le pays, pour dénoncer l’amalgame entre la responsabilité politique du chef de l’État et l’insuffisance des moyens des tribunaux.