Camille Emmanuelle est chroniqueuse érotique. Dès que possible, dans 42mag.fr, elle répondra aux dix meilleures questions posées par les lecteurs sur un thème précis, sur la fanpage Facebook, ou sur le compte Twitter de la rédaction, en ajoutant le hashtag #demandeàcamille. Cette semaine, Camille nous parle de simulation, oh oui…
Est-ce que toutes les femmes simulent ?
Je n’ai pas interrogé toutes les femmes du monde. Cependant, sur un panel très représentatif de douze filles autour de moi, je dirais « non », mais c’est arrivé au moins une fois dans la vie d’une femme. Après, je pense que cela ne se passe pas non plus comme dans Quand Harry rencontre Sally, elles ont déjà juste soupiré un peu plus fort, et fait croire ainsi au garçon qu’ayé, elles avaient joui. Les petites malignes.
« Je pense que cela ne se passe pas non plus comme dans Quand Harry rencontre Sally, elles ont déjà juste soupiré un peu plus fort, et fait croire ainsi au garçon qu’ayé, elles avaient joui. Les petites malignes. »
Parfois, nous aussi on simule, on est en levrette, on se fait chier, ça vient pas… La simulation, c’est pas que pour les femmes, si ?
Non, bien sûr ! Vous aussi, vous êtes des petits malins. J’ai une théorie (oui, encore une) : la sexualité masculine est tout aussi complexe que celle des femmes. Un homme peut ressentir du désir, du plaisir, sans avoir d’orgasme. Et il peut aussi jouir, sans vraiment avoir pris de réel plaisir. Enfin, il peut avoir un orgasme sans éjaculer. Avec votre point G à vous, le point P. Non, je ne parle pas des magasins de matériaux de construction, mais du plaisir prostatique. Alors imagine un homme qui simulerait cet orgasme-là… tricky, non ?
Finalement, est-ce que c’est vraiment mal ? Ce n’est pas parfois une façon de réguler le couple ?
Je vois trois situations :
- La fille s’ennuie royal au lit avec un coup d’un soir, elle simule car elle se rappelle que le lendemain elle a un rendez-vous avec un client hyper important à 9h, et que donc elle doit dormir (non non, ce n’est pas du vécu). Ce n’est pas un mal. Car le boulot c’est important. Et les cernes, c’est moche.
- Elle est en couple, mais ne jouit que très rarement, mais elle fait croire à son mec que oui. Donc ils n’en parlent pas, et ne vont pas chercher ensemble ce plaisir. C’est un peu triste.
- Elle est en couple, cela se passe bien, mais ce soir-là, elle ne jouit pas. Eh bien cela arrive, pourquoi simuler ? Le mec ne va pas s’effondrer en sanglots, hein, il va juste s’endormir. L’orgasme procuré par l’autre, c’est comme les antibiotiques, c’est pas automatique. Mais heureusement que cela existe quand même. Et c’est mieux que le placebo, c’est-à-dire la simulation. Et mieux que l’homéopathie, c’est-à-dire l’orgasme du plaisir solitaire.
Cela peut durer longtemps, dans un couple ?
Je ne le souhaite à aucun couple. Comme je te le disais juste au-dessus (mais tu es resté scotché sur ma métaphore médicamenteuse, non ?), si cela dure, cela fait un peu « on cache la poussière sous le tapis ». Sauf que là, on cache le non-plaisir sous les gémissements. Or la poussière s’accumule, et à la fin, ça fait plein de moutons de frustration, et on étouffe dans son couple. Ça, c’était la métaphore ménagère.
Comment faire pour dire à une fille qui se prend pour une star du porno, qui crie comme un cochon qu’on égorge, qu’elle se calme ? Personne n’a jamais voulu coucher avec une fusion de Lara Fabian et d’Iggy Pop…
Moi j’aurais bien aimé coucher avec Iggy Pop… Bref. Soit elle fait vraiment cela pour imiter les stars du X, et oui, il faut qu’elle arrête, c’est insupportable. Donne-moi son téléphone. Soit elle est sincère, c’est sa façon de jouir, et c’est ainsi. Tu n’as qu’à mettre des boules Quiès. Ou lui dire que tes voisins appellent les flics dès qu’il y a un peu de bruit. Mais on peut parler des mecs qui poussent des râles horribles, entre Rahan et Garou ?
Quand on voit Karen Bach se faire baiser sans la moindre expression sur le visage dans Baise-moi de Virginie Despentes, on se dit que finalement, la simulation, ça a du bon, non ?
Le plaisir exprimé a du bon, oui. Rien de pire que la non-expression du visage, les yeux fermés tout du long, ou le silence total. Même si cela arrive sur le marché du sexe, on ne baise pas (encore) avec des robots. Enfin cela peut être un jeu sexuel en soi, de contrôler l’expression de son plaisir ou de jouer la frigidité. Mais, conseil d’amie : pensez dès lors à prévenir votre partenaire que c’est un jeu.
Est-ce que ce n’est pas culturel, lié à la libération de la femme, finalement, la simulation ? Parce qu’en Asie, culturellement, les femmes ne doivent pas faire de bruit. Gémir doucement, au mieux… Le fait qu’un homme prenne plaisir à voir une femme jouir, c’est bon signe, non ?
Agnès Giard parlerait mieux de l’Asie, et particulièrement du Japon, que moi, mais je crois que là-bas, beaucoup de choses passent par les expressions du visage et des yeux. Ceux-ci sont très érotisés dans les représentations pornographiques. Mais je ne vois pas le rapport entre libération de la femme et simulation. Au contraire, simuler, c’est faire croire à l’homme qu’il donne du plaisir alors que ce n’est pas le cas, pour le rassurer, ou le flatter. Et donc, pour les femmes, c’est rester dans la frustration au lieu de guider le garçon vers ce qui lui donne vraiment du plaisir. Y a plus libérée comme attitude, non ? Quant au plaisir que prend un homme à voir la femme jouir, oui c’est en effet bon signe. Cela veut dire qu’il a dépassé l’attitude post-adolescente du mec qui se regarde faire (« Chéri… hum.. comment te dire, il n’y a pas de caméra, là… »).
On constate souvent que les gens sont déçus de leur vie sexuelle, mais est-ce que ce n’est pas dû à une malbouffe sexuelle ? N’y a-t-il pas que peu de chance de prendre son pied avec une personne rencontrée à moitié bourré en boîte ?
« Le plaisir exprimé a du bon, oui. Rien de pire que la non-expression du visage, les yeux fermés tout du long, ou le silence total. »
Oh ! Belle métaphore gastronomique ! Oui, je suis plutôt d’accord avec toi. Il est souvent plus épanouissant de découvrir, déguster, savourer avec le temps un ou une partenaire que d’enchaîner les quickies (d’ailleurs quickie viendrait-il de Quick ? Je pose la question). Et si la nuit est un temps érotique et sexuel, j’ai souvent constaté que les noctambules et fêtards invétérés, en picolant jusque 5h du mat, repoussaient étrangement les instants d’érotisme et de sexe. La peur infantile de se coucher remplacée par la peur adulte de coucher ?
Parfois, il semble aussi qu’en en rajoutant, en simulant un peu, les femmes finissent par jouir réellement. Est-ce que la mise en scène de soi ne fait pas parfois partie du plaisir ?
Alors là, tout à fait d’accord. Mais là, ce n’est pas de la simulation à proprement dit, mais plus de l’auto-stimulation. On s’excite soi-même à s’entendre gémir. Nuance, très cher, nuance.
Au final, t’as voulu qu’on te pose des questions sur ce sujet, mais il est chiant, non ?
Grave. En plus je réponds comme une sexologue, que je ne suis absolument pas. C’est de ma faute. Mea culpa, mea maxima culpa. Je vais aller me fouetter, et pousser, cette fois-ci, de vrais petits cris. Métaphoriquement parlant, bien sûr.
bonjour
bonjour monsiure je suis nooveaux